Les femmes enceintes du Nouveau-Brunswick qui souhaitent mettre fin à leur grossesse pourront obtenir gratuitement la pilule abortive… à condition de dénicher un médecin formé pour la leur prescrire.

Fredericton a annoncé mardi que le Mifegymiso serait bientôt couvert par le régime public d’assurance-maladie.

Mieux connu sous le nom de pilule abortive, le Mifegymiso est une combinaison de médicaments approuvée pour l’interruption médicale de la grossesse jusqu’à sept semaines après le dernier cycle menstruel.

«En offrant le Mifegymiso gratuitement à toutes les femmes du Nouveau-Brunswick, notre gouvernement s’assure que les obstacles financiers n’entravent pas le droit des femmes de choisir», a déclaré le ministre de la Santé, Victor Boudreau.

Utilisée en Europe depuis une trentaine d’années, la pilule abortive a seulement été autorisée par Santé Canada en juillet 2015. Elle est disponible sur le marché canadien depuis le mois de janvier.

Malgré certains bémols, la décision du gouvernement est saluée par le milieu féministe.

«Nous accueillons favorablement cette nouvelle. C’est quelque chose que nous avons demandé depuis 2015», réagit la directrice générale du Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick, Nelly Dennene.

24 médecins inscrits

Plusieurs conditions à l’utilisation du Mifegymiso pourraient toutefois empêcher de nombreuses femmes d’avoir accès à l’avortement médicamenteux.

Afin de pouvoir prescrire la pilule abortive, les médecins doivent d’abord suivre une formation en ligne de cinq heures, offerte par la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada.

En février, seulement 24 médecins du Nouveau-Brunswick s’étaient inscrits pour suivre cette formation, selon la Société.

«Nous espérons qu’en en parlant publiquement, davantage de médecins vont se porter volontaires», indique le ministre Boudreau.

La présidente de la Société médicale du Nouveau-Brunswick, Dre Lynn Murphy-Kaulbeck, estime que peu de médecins néo-brunswickois ont suivi la formation sur la pilule abortive puisqu’elle est offerte au Canada depuis à peine trois mois.

«Nous croyons qu’un plus grand nombre de médecins suivront la formation au fur et à mesure que son usage deviendra plus répandu dans la province.»

Il n’existe pas de répertoire public pour permettre aux femmes de contacter les médecins qui ont été formés pour prescrire l’avortement médicamenteux.

«C’est un obstacle inquiétant. C’est encore très politisé comme enjeu. Est-ce que la femme va pouvoir arriver devant un médecin qui a vraiment à coeur sa santé et pas des conceptions idéologiques par rapport à ses principes», prévient Mme Dennene.

Échographie obligatoire

Les directives de Santé Canada obligent également les patientes à subir une échographie avant de prendre la pilule abortive qui doit par la suite absolument être administrée en présence d’un médecin.

Ces directives ne font pas l’unanimité au pays. Le groupe Action Canada pour la santé et les droits sexuels réclame notamment le prolongement de la limite de gestion de sept à dix semaines ainsi que l’abolition de l’échographie obligatoire.

Selon l’organisme sans but lucratif, la pilule abortive pourrait être administrée par d’autres professionnels de la santé, comme des infirmières praticiennes ou des sages-femmes. Action Canada souhaite également la création d’un registre national public des professionnels de la santé qui sont formés pour prescrire le Mifegymiso.

Avant de pouvoir être couvert par l’Assurance-maladie, le Mifegymiso doit encore passer l’étape du Programme commun d’évaluation des médicaments de l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé. L’Alliance pharmaceutique pancanadienne négociera par la suite le prix du médicament avec le distributeur, Celopharma, au nom des provinces avant que le programme d’assurance-maladie ne commence à en défrayer les coûts.

«Nous sommes probablement encore à quelques mois de pouvoir mettre en oeuvre notre programme», résume le ministre Boudreau.

La pilule abortive peut coûter de 300$ à 450$.

Santé Canada affirme sur son site Web que les risquent de l’avortement médicamenteux «ne sont pas moindres» que ceux de l’avortement chirurgical. L’agence fédérale avance que «jusqu’à une utilisatrice du médicament sur 20 devra subir une intervention chirurgicale de suivi parce que la grossesse s’est poursuivie» malgré la prise du Mifegymiso.

L’avortement chirurgical est offert gratuitement dans trois hôpitaux au Nouveau-Brunswick, c’est-à-dire à Moncton et à Bathurst. La clinique privée 554 de Fredericton fait aussi des avortements chirurgicaux, mais ceux-ci ne sont pas couverts par l’Assurance-maladie.

Le Regroupement féministe demande toujours l’élargissement de l’offre d’avortement chirurgical sur le territoire néo-brunswickois malgré l’arrivée de la pilule abortive.

En rencontre éditoriale avec l’Acadie Nouvelle en janvier, le premier ministre Brian Gallant avait indiqué au journal que son gouvernement étudiait la possibilité de faire des avortements dans plus d’hôpitaux, sans toutefois prendre d’engagement concret.

L’opposition officielle, le Parti progressiste-conservateur, n’a pas répondu à notre demande d’entrevue au sujet de l’annonce du gouvernement.

 

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