Un rapport dévoilé mercredi laisse sous-entendre que la présentation de rodéos au Québec serait incompatible avec la philosophie de la nouvelle loi sur le respect des droits des animaux.

Alain Roy est professeur titulaire à la Faculté de Droit de l’Université de Montréal. Il enseigne notamment le cour Éthique et droit de l’animal. Se basant sur la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal, il a contesté l’an dernier la tenue du rodéo prévu dans le cadre des festivités du 375e anniversaire de Montréal.

Une entente hors cour a toutefois permis à l’événement d’avoir à certaines conditions, notamment qu’une équipe d’observateurs puissent se rendre sur le site (ainsi que celui rodéo de Saint-Tite, le plus important au Québec) afin de documenter sous différents angles les activités et les traitements infligés aux animaux. Leurs conclusions se trouvent dans un rapport de plus de 650 pages rendu public mercredi.

On peut notamment y lire que les activités de dressage soumettent les chevaux et les taureaux à des risques de lésions et de graves blessures. Il en est de même pour la prise de veaux au lasso et pour le terrassement des bouvillons. La détresse psychologique des animaux serait bien réelle d’après le rapport.

Selon M. Roy, le nouveau cadre juridique adopté en 2015 rendrait du coup la présentation de ces spectacles illégale. «Avec cette loi, on a sorti l’animal de la catégorie des choses pour le mettre dans celle des êtres sensibles. Quand je vois un veau être jeté par terre puis traîné sur plusieurs mètres avec la corde au cou, j’ai beaucoup de difficulté à concilier cela avec la nature d’être sensible que reconnaît désormais à l’animal», a confié au journal M. Roy.

Selon son interprétation, la loi n’exige pas que la blessure se réalise. Elle stipule simplement qu’on ne peut exposer les animaux à des abus et mauvais traitements pouvant affecter leur santé. «En ce sens, les rodéos comportent leurs lots de risques pour les animaux compte tenu de la violence de la situation ainsi de l’état de panique et de détresse que l’on provoque chez les animaux», poursuit-il.

L’entente prévoyait également la mise sur pied d’un Comité consultatif sur les rodéos incluant divers partis afin que la situation puisse être discutée et que des recommandations soient effectuées à l’attention du ministère de l’Agriculture (responsable dossier) afin que la loi soit respectée.

Devrait-on du coup abolir certaines disciplines, voire les rodéos? M. Roy préfère ne pas s’avancer sur la question, laissant le soin au comité de faire son travail.

«Mais on a vu d’autres juridictions au pays interdire, par exemple, l’utilisation des sangles et les éperons qui provoquent les ruades et qui exposent souvent les animaux aux blessures. Il y a donc des moyens d’atténuation qui existent», souligne-t-il, ajoutant d’un même trait qu’il se réserve le droit de retourner devant les tribunaux si les futurs changements proposés ne lui sont pas satisfaisant ou pire, si le statu quo est maintenu.

Le comité doit remettre son rapport d’ici le mois d’août. À noter que les organisateurs du Festival western de Saint-Tite ont estimé qu’il s’agissait d’un rapport biaisé. Par communiqué, ils ont fait valoir que ses conclusions correspondent, selon eux, à une interprétation abusive de la loi.

Impact à Saint-Quentin?

Le producteur des rodéos en cause à Montéal et Saint-Tite n’est nul autre que les Productions Wild Time, celui-là même qui remplit depuis des années l’arène de Saint-Quentin durant son fameux Festival Western. Il va donc de soi que dans la ville du Restigouche-Ouest, on suit de très près l’évolution de ce dossier, même s’il se déroule dans la province voisine ou la loi diffère.

«Si nous sommes le plus gros festival western en Atlantique, c’est grâce à nos rodéos professionnels. On ne fait pas une tonne d’argent avec eux pour le moment, mais ils servent beaucoup à attirer les gens au festival. Le jour où nous n’en aurons plus, nous n’aurons plus le même impact, c’est certain», exprime le président du comité organisateur du festival, Bertrand Leclerc.

Ce dernier ne voit d’ailleurs en rien comment la présentation de rodéo peut être considérée comme de la cruauté envers les animaux.

«On est loin des toréadors qui blessent et tuent des taureaux. On est aussi loin des chenils qui maltraitent leurs animaux. Les bêtes utilisées à notre rodéo ne sont pas maltraitées, bien au contraire. C’est le gagne-pain des producteurs, ils se doivent d’en prendre soin. En fait, j’ai vu bien plus souvent les cowboys se faire mal que les animaux», témoigne-t-il, avouant qu’il se peut fort bien que des accidents arrivent de temps à autre aux bêtes.

«Mais ce n’est en rien de la cruauté, il n’y a pas d’intention derrière un accident. Personne n’y gagnerait s’il y avait de la cruauté. Ni le producteur ni la réputation de notre festival. Et ça, on y tient», indique-t-il.

– Avec des extraits de la Presse canadienne

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