Les locaux de la clinique 554, à Fredericton. - Archives
EXCLUSIF – Avortement: le N.-B. dans l’illégalité
Les libéraux de Brian Gallant contreviennent à la loi fédérale en matière de paiement de services médicaux liés à l’avortement, selon des militantes. La réglementation actuelle prive les cliniques privées d’avoir recours à l’assurance-maladie provinciale. Les femmes doivent ainsi payer les procédures par leurs propres moyens à moins d’être traitées dans un centre hospitalier reconnu.
En 2014, le premier ministre promettait en campagne électorale d’améliorer l’accès à l’avortement pour les femmes. Quatre ans plus tard, certaines procédures ont été mises en place, mais il y a encore beaucoup à faire selon l’organisme Justice reproductive du Nouveau-Brunswick (JRNB).
«Nous voulons qu’il y ait un meilleur accès à travers la province pour les femmes», nous dit Tracy Glynn, représentante de JRNB.
La réglementation du Nouveau-Brunswick est critiquée par l’organisme.
Plus précisément, l’annexe 2 du règlement 84-20 de la Loi sur les paiements des services médicaux est visée. Celle-ci stipule que les procédures doivent être effectuées dans un centre hospitalier afin d’être couvertes par l’assurance-maladie provinciale. Une barrière à l’accessibilité dénonce l’organisme.
«Le retrait cette réglementation permettrait un financement approprié de l’assurance-maladie pour les services liés à l’avortement donnés à l’extérieur des centres hospitaliers», peut-on lire dans une affiche publiée sur les réseaux sociaux de l’organisme.
Qui plus est le chapitre M-7, section 2.01 de la même loi est «illégal» selon Joyce Arthur, directrice générale de la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada (CDAC).
Le chapitre stipule que «le plan de service médical n’offrira pas de paiement pour : (b) pour les services assurés fournis dans un établissement hospitalier privé de la province.»
«Ça va à l’encontre de ce qui est écrit dans l’Acte de Santé du Canada (Canadian Health Act) en1995, explique Joyce Arthur. Ce n’est pas légal pour une province de faire ainsi.»
Le Nouveau-Brunswick est d’ailleurs la seule province au pays à être doté d’un pareil règlement, explique Mme Arthur.
«Dans les autres provinces, les cliniques privées peuvent facturer l’assurance-maladie pour être remboursées pour les procédures.»
Justice reproductive du Nouveau-Brunswick indique par ailleurs qu’elle ne milite pas pour que le gouvernement finance les institutions privées, mais pour qu’il finance l’assurance-maladie.
«Il est important de dire que nous ne sommes pas en faveur de la privatisation du système de santé. Ce n’est pas notre objectif», mentionne Mme Glynn.
Depuis un certain temps, la CDAC tente de faire pression sur le gouvernement fédéral. Une stratégie qui s’est avérée peu efficace jusqu’ici reconnaît Joyce Arthur.
«Ils n’ont pas beaucoup de pouvoir sur cela, avoue-t-elle. Mais ils peuvent retenir le financement qu’ils donnent à la province en matière de santé. C’est ce que nous leur demandons de faire en attendant que le Nouveau-Brunswick agisse.»
Justice reproductive Nouveau-Brunswick, pour sa part, concentre ses efforts sur des campagnes actives. Ils ont notamment contribué à la levée de fonds qui a permis la réouverture de la Clinique 554, à Fredericton. Cette dernière n’est toutefois pas un établissement reconnu. Il faut payer pour y obtenir des soins.
Mme Arthur indique aussi que de plus en plus de femmes optent pour les cliniques privées parce que les délais sont souvent moins longs et que l’avortement est soumis à des contraintes temporelles.
De plus, Justice reproductive Nouveau-Brunswick déplore le manque de ressources requis pour les traitements.
«Il y a tout de même des barrières présentes malgré le financement de l’assurance-maladie. Celles-ci incluent un manque de médication, un manque de médecin capable et voulant administrer cette médication. L’accès à un test ultrason est aussi limité», lit-on également.
Depuis son élection en 2014, le gouvernement Gallant a retiré, en 2015, une réglementation qui rendait nécessaire l’avis de deux médecins pour entamer les traitements.
«Nous saluons le travail qu’a fait le gouvernement jusqu’ici, mais il doit en faire plus pour tenir ses promesses», poursuit Tracy Glynn.
Ce changement facilitait le processus pour les femmes désirant être avortées.
De plus, les libéraux ont ajouté un point de service à Moncton, ville où il y avait déjà une facilité médicale.
Au total, le Nouveau-Brunswick compte trois points de service où il est possible de se faire avorter. L’autre clinique est située à Bathurst.