Par Lili Mercure
Maurice Johnson a plaidé non coupable à des accusations d’avoir omis de s’arrêter sur la scène d’un accident dont les lésions corporelles ont causé la mort de Brady Francis. - Archives
Mort de Brady Francis: la défense doute de la fiabilité de certaines preuves
Un membre de la GRC a présenté à la cour mercredi la ligne chronologique des faits le soir où Brady Francis est mort. Des éléments importants de l’enquête sont fixés dans le temps via les caméras de surveillance du Dépanneur Saint-Charles. Un véhicule similaire au GMC Sierra de l’accusé y apparaît ainsi que Brady Francis, toujours en vie.
Le huitième jour du procès de Maurice Johnson, le constable Mathieu Richard, du détachement de Richibucto de la GRC, a apporté des éléments temporels de l’affaire à la cour.
Le constable Richard a analysé les enregistrements vidéo du Dépanneur Saint-Charles, preuve à conviction dans l’enquête de la mort de Brady.
Brady Francis, un jeune autochtone âgé de 22 ans, de la Première nation d’Elsipogtog, a été happé mortellement alors qu’il était sur le chemin Saint-Charles-Sud, le 24 février 2018.
M. Johnson a plaidé non coupable à des accusations d’avoir omis de s’arrêter sur la scène de l’accident.
L’avocat de la défense, Gilles Lemieux, a contesté la fiabilité d’une partie de la preuve présentée mercredi.
Les temps indiqués sur les caméras de vidéosurveillance du Dépanneur Saint-Charles sont sept minutes et demie plus tard que l’heure réelle. L’heure réelle étant celle vérifiée par le constable Richard, à l’aide de son téléphone.
«C’était basé sur votre téléphone. Comment avez-vous réalisé que l’heure était bonne sur votre téléphone?», a demandé Me Lemieux au constable.
Il n’y a aucune façon de vérifier l’exactitude de l’heure du téléphone du constable Richard. La seule marque temporelle fiable pour la cour est l’heure de l’appel 911, argumente la défense.
«Il y a clairement un problème avec le temps et le temps que vous avez utilisé n’est pas contre-vérifié. Ce n’est pas fiable», a dit Me Lemieux dans son contre-interrogatoire.
Le procureur, Pierre Gionet, s’est opposé en insistant sur l’admissibilité de cette preuve.
«La cour avait accordé le droit de témoigner à constable Richard», dit-il.
La juge Denise LeBlanc considère que la synchronisation est le plus gros problème de la preuve.
«Je ne suis pas prête à accorder la preuve de l’heure réelle. C’est plutôt l’heure ajustée.»
À la suite d’une pause d’audience, Me Gionet a présenté une décision de la cour de l’Ontario stipulant que les téléphones cellulaires donnent l’heure juste.
«Vous avez la preuve qu’il y a eu des erreurs de calcul. Je maintiens que sa valeur n’est vraiment pas très élevée», reproche la défense.
De plus, neuf véhicules ont circulé sur les enregistrements de la vidéosurveillance examinés par les enquêteurs, dont celui de Maurice Johnson. La défense reproche à la Couronne de ne pas avoir examiné les huit autres véhicules.
«Les autres véhicules n’ont pas été vérifiés et vous n’avez pas d’expertise à vérifier le temps», réitère Me Lemieux.
Pierre Gionet a demandé du temps à la juge pour préparer sa réponse.
La juge LeBlanc a laissé au procureur jusqu’à vendredi matin afin de prouver que l’heure sur les enregistrements de la vidéosurveillance par rapport à l’heure d’un téléphone, est un élément de preuve fiable.
Un camion similaire à celui de Maurice Johnson capté sur vidéo
Certains témoins apparaissent sur la vidéo des caméras de surveillance du Dépanneur Saint-Charles. On voit Brady Francis, en vie quelques minutes avant sa mort. Un camion similaire au GMC Sierra de l’accusé se glisse aussi dans l’image.
Présentées par Mathieu Richard, constable à la GRC, les images des caméras du dépanneur donnent un bon aperçu des véhicules qui ont circulé sur la route Saint-Charles-Sud le soir du drame.
Brady a traversé l’écran vers l’ouest à 21h10, téléphone à la main. II est identifié par le constable Richard grâce à ses souliers blancs.
Par la suite, il a disparu du panorama. L’heure affichée sur les caméras surveillance du Dépanneur Saint-Charles n’est pas exacte. Elle aurait sept minutes de demie d’avance sur le temps réel, selon le constable Richard.
Plusieurs véhicules ont fait leur apparition après le passage du jeune homme.
Brady Francis est réapparu à 21h34 dans l’image: il revenait sur ses pas et parlait toujours au téléphone. Brady a poursuivi sa route vers l’est avant de disparaître de l’image.
Les policiers se sont intéressés à un camion de couleur pâle. Le véhicule circulait vers l’est à 21h40.
Le temps réajusté du gendarme Richard est de 21h33.
«C’est le véhicule qui a été saisi à la propriété de Maurice Johnson», précise constable Richard.
Deux minutes plus tard, les sœurs Betts ainsi que Brett Bernard sont passés à bord d’un VUS. Ils ont été suivis par Krista et Rosaire Daigle roulant dans un VTT à 21:51.
Les Betts et Brett Bernard sont donc les premiers à être arrivés sur la scène et à s’être portés au secours de Brady.
Une première ambulance est arrivée à toute allure à 21h56, suivie par d’autres paramédicaux et la GRC à 21h58.
Brady Francis a été déclaré mort à 22h22
Entre le passage de Brady devant le Dépanneur Saint-Charles et l’arrivée des secours, neuf véhicules sont passés sur la route Saint-Charles-Sud. Ils auraient tous pu croiser Brady. La Couronne croit que c’est celui de M. Johnson qui a heurté le jeune autochtone.
M. Johnson a dit à la GRC qu’il pensait avoir frappé un chevreuil le soir de la mort de Brady. Il faisait une balade en voiture accompagnée avec sa femme.