Par Lili Mercure
Jacinthe Johnson, l’épouse de Maurice Johnson, a témoigné pour la défense lors du 10e jour de procès. Elle était passagère au moment où son mari a frappé ce qu’il a décrit comme étant un chevreuil.
Mort de Brady Francis: la conjointe de l’accusé ne voulait pas sortir du véhicule
Jacinthe Johnson a témoigné lors du procès de son mari, accusé de délit de fuite ayant causé la mort du jeune Brady Francis. Le couple circulait sur la route Saint-Charles-Sud lorsqu’il a heurté ce qu’il pensait être un chevreuil, a-t-elle raconté. Son conjoint a voulu aller voir. À l’inverse, elle a souhaité quitter les lieux.
Brady Francis, un autochtone âgé de 22 ans, de la nation d’Elsipogtog, a été happé mortellement le 24 février 2018.
Maurice Johnson, âgé de 57 ans, de Saint-Charles, a plaidé non coupable à des accusations d’avoir omis de s’arrêter sur la scène d’un accident mortel. Il a choisi un procès devant juge seul.
Jacinthe Johnson, l’épouse de l’accusé, s’est présentée à la barre des témoins lundi, lors de la 10e journée d’audience. Elle était à bord du véhicule lorsque son mari a frappé ce qu’il a cru être un chevreuil, selon ses dires.
Le jour du drame, le couple Johnson avait planifié d’aller faire quelques emplettes à la Coopérative de Saint-Louis pour y acheter, entre autres, de la vodka. Le spiritueux devait servir à concocter une recette de barbotine alcoolisée, se souvient Mme Johnson.
Ils sont arrivés à la coopérative vers 15h. M. Johnson est allé chercher la vodka sur les tablettes. Son épouse s’est dirigée vers le réfrigérateur pour se procurer une caisse de 24 bières.
De retour à la maison, Mme Johnson a mis huit bières dans une glacière pour sa consommation personnelle. Selon sa conjointe, M. Johnson avait mal à la tête. Il s’est donc abstenu de boire et a agi comme conducteur désigné pour la journée, d’après Mme Johnson.
Ils sont partis de la maison à 15h30 pour se rendre dans un camp de chasse où M. Johnson a une cabine, près de Richibucto. Ils sont ensuite partis vers d’autres camps en empruntant le chemin des Colons.
Le couple aurait passé l’après-midi et le début de la soirée à se promener dans les bois où Maurice Johnson a récité des histoires de chasse.
«Il y a beaucoup de places où il chasse et c’est dans toutes sortes de chemins.»
La nuit était tombée vers 19h. Fatigués, ils voulaient rentrer à la maison.
Mme Johnson avait bu sept des huit bières qu’elle a amenées. Son mari a pris le volant, comme prévu.. Jacinthe Johnson était assise du côté passager et tenait sa chienne sur ses genoux.
«Tout d’un coup, Maurice a donné un gros coup de volant.»
Elle lui a demandé pourquoi il avait fait ça. La chienne avait eu peur. M. Johnson lui aurait répondu qu’il avait frappé un chevreuil.
Dans son contre-interrogatoire, Mme Johnson affirme avoir à peine senti un impact.
«On a regardé chaque bord pour essayer de trouver le chevreuil. Il n’y avait pas de chevreuil.»
Pierre Gionet, procureur de la Couronne, a demandé à la témoin si le couple n’avait pas regardé dans le rétroviseur pour voir s’il y avait quelque chose en arrière. Mme Johnson a dit non.
«Moi je n’ai rien vu du tout. J’ai regardé de mon bord, il n’y avait rien. J’ai dit à Maurice qu’il [le chevreuil] s’était sauvé et n’était plus là. Maurice a quand même regardé de son bord.»
Ils se seraient ensuite arrêtés un peu plus loin, soit cinq mètres après le point d’impact.
«C’est moi qui ne voulais pas arrêter», a dit Mme Johnson à la cour, affirmant qu’elle a eu peur de sortir.
«Maurice m’a dit “on devrait sortir aller voir”. Moi j’ai dit non, je ne peux pas aller voir. Je ne voulais pas voir un chevreuil blessé.»
«Vous auriez pu rester dans le véhicule, M. Johnson serait allé voir», a répliqué Me Gionet.
Elle a répété qu’il n’était pas question qu’elle ou son mari débarque du véhicule.
«Ce que femme veut, Dieu le veut», a-t-elle souligné à la Couronne.
Ils sont rentrés à la maison à 21h30.
«Après ça, j’ai monté dans ma chambre et je me suis couchée.»
Un peu plus tard, les policiers sont passés à toute allure sur la rue Saint-Charles-Sud pour répondre à l’appel d’urgence. Le couple dit ne pas avoir entendu les sirènes.
Le lendemain matin, Jacinthe Johnson a ouvert son fil d’actualité Facebook. Une amie lui aurait demandé si elle était au courant d’un accident survenu près de chez elle la veille.
Elle a fouillé un peu plus sur le réseau social afin d’en connaître les détails.
«J’ai vu une publication de la GRC. Ils cherchaient un camion qui avait été impliqué dans un accident. Ils cherchaient un GMC.» La camion du couple est un GMC.
Mme Johnson a appelé la police pour leur dire que son mari avait frappé, la veille, un chevreuil sur la route Saint-Charles-Nord.
Les policiers sont arrivés chez les Johnson, les ont informés de la mort de Brady Francis et ont pris leurs dépositions.
L’enquête qui a suivi à menait aux accusations contre Maurice Johnson.
La Couronne et la défense ont terminé d’appeler des témoins. Le procès est ajourné jusqu’au 7 février. Les deux parties présenteront alors leurs arguments finaux à la juge Denise LeBlanc.