Le député vert Kevin Arseneau. - Archives
Corporations commerciales: le registre ne sera pas public
Le registre des corporations du N.-B. ne sera pas accessible pour les journalistes, les chercheurs et le reste du public lorsqu’il sera mis sur pied, déplorent des députés libéraux et verts.
Le gouvernement progressiste-conservateur a déposé un projet de loi visant à créer un registre des personnes qui exercent un contrôle significatif sur des corporations commerciales, notamment leurs propriétaires bénéficiaires et leurs actionnaires.
Si la loi est adoptée, les quelque 38 000 corporations enregistrées au N.-B. devront remettre ces informations au gouvernement, qui pourrait alors les transmettre à la police, aux organismes de réglementation ou aux autorités fiscales, telles que l’Agence du revenu du Canada.
Ce nouveau registre vise à combattre les pratiques illégales comme le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, ou encore l’utilisation de corporations commerciales comme paravent pour des activités terroristes.
Le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), une agence gouvernementale qui vise à détecter et prévenir le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes, y aura également accès.
Mais ces informations ne seront pas disponibles pour le public, y compris les journalistes et les chercheurs, ce que déplore Kevin Arseneau, député du Parti vert de Kent-Nord.
Il a passé une bonne partie de la journée à cuisiner la ministre de Service NB, Mary Wilson, lors d’une réunion du comité permanent de la Politique économique, à l’Assemblée législative.
«Ces entreprises-ci, si elles n’ont rien à cacher, je suis certain qu’elles ne seront pas stressées», a lancé le député vert.
La ministre Wilson a fourni des réponses courtes, sans répondre clairement à bon nombre de questions.
En lisant ses réponses d’une feuille, elle a aussi répété les mêmes phrases à plusieurs reprises, y compris que l’idée d’un registre corporatif public «nécessite plus de recherche» et que cela n’est pas la norme dans plusieurs autres provinces canadiennes.
Elle a affirmé que le gouvernement n’a pas obtenu beaucoup d’appui lors de ses consultations pour que le registre soit rendu public.
Kevin Arseneau a exprimé des doutes face aux consultations du gouvernement en affirmant que certains des groupes consultés, comme «des groupes d’avocats, d’entreprises et de comptables», ont intérêt à ce que «le système demeure opaque».
Il a rétorqué que le gouvernement aurait dû consulter «des experts indépendants» en matière d’évasion fiscale, de blanchiment d’argent et de financement d’activités terroristes.
Le député de Kent-Nord n’était pas satisfait des réponses de la ministre.
«Vous n’avez pas été capable de nous donner un argument pourquoi on ne le rendrait pas public.»
Il a déposé un amendement qui aurait obligé les corporations à fournir les mêmes informations au public. Il a obtenu l’appui des libéraux qui siègent au comité, mais l’amendement a été rejeté.
Les députés progressistes-conservateurs Jeff Carr, Kris Austin, Ross Wetmore et Sherry Wilson ainsi que la ministre Mary Wilson ont voté contre l’amendement.
Le député libéral Jacques LeBlanc a exprimé son appui envers la motion du député vert.
Il estime que le Nouveau-Brunswick a raté sa chance d’être un pionnier en matière de transparence corporative.
«Vous avez eu la chance d’aller au fond des choses, de vous démarquer, (…) d’avoir une meilleure transparence au niveau du blanchiment d’argent et de ces compagnies enregistrées qui font des activités illégales ici au N.-B.»
Le député affirme qu’il a réalisé plusieurs demandes d’accès à l’information depuis son entrée en poste, et qu’il est plus fréquent de recevoir des pages caviardées que de l’information claire.
Les infos sur les compagnies privées sont généralement biffées dans les réponses du gouvernement à des demandes d’accès à l’information.
Des décisions au cas par cas
Pour le moment, il est loin d’être clair si le bureau du commissaire à l’intégrité, qui est notamment chargé d’enquêter sur des questions de conflit d’intérêt de la part de députés et de ministres, aura accès aux informations figurant dans ce registre, selon les propos de la ministre.
«Tous les organismes d’enquête auront accès à cette information. Si le commissaire à l’intégrité fait une demande d’informations à Service NB, nous évaluerons cette demande le moment venu. En tant qu’agent de l’Assemblée législative, nous aurions besoin de confirmer son autorité et ses pouvoirs dans ce domaine», a répondu la ministre à une question de M. Arseneau.
Elle a précisé que le procureur général devrait alors statuer sur la question.