La présidente du Conseil des syndicats des foyers de soins du Nouveau-Brunswick, Sharon Teare. - Archives
Foyers de soins: le SCFP et le gouvernement s’affrontent sur le déficit du régime de pensions
Le Conseil des syndicats des foyers de soins du Nouveau-Brunswick demande l’intervention de la surintendante des pensions afin de forcer le gouvernement d’accepter de corriger le déficit structurel de leur régime de retraite.
Le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) a annoncé avoir déposé une plainte officielle auprès de la surintendante des pensions du Nouveau-Brunswick, Angela Mazerolle, lors d’une conférence de presse jeudi matin.
D’après le SCFP, le régime de retraite des travailleurs de foyers de soins connaît un déficit de 112 millions $ et n’était financé qu’à 83% en 2020.
Le syndicat demande que les contributions passent de 8% à 11% afin de combler le déficit.
«Nous avons envoyé une plainte officielle à Angela Mazerolle, surintendante des pensions, à l’égard du sous-financement critique de nos régimes de retraite et afin de lui demander d’intervenir», a expliqué Sharon Teare, présidente du Conseil des syndicats des foyers de soins du Nouveau-Brunswick (CSFSNB).
D’après le CSFSNB, Fredericton refuse de permettre aux travailleurs et aux gestionnaires des foyers de soins d’augmenter leurs contributions au régime de retraite afin de corriger le problème.
«La viabilité du régime est en péril puisque les lois régissant les pensions dans la province n’ont pas été respectées», dit pour sa part Emily Niles, conseillère en recherche sur les pensions du SCFP.
Le syndicat dit avoir participé, en 2018, à un exercice de révision lancé par le gouvernement puisque ce dernier jugeait le statu quo intenable.
L’initiative devait notamment mener à une série de recommandations du ministère des Finances afin de corriger la situation. D’après le SCFP, le ministère des Finances refuse de partager ce rapport.
D’après le ministère des Finances, la révision a montré que le régime de retrait n’est pas viable sans paiements spéciaux, et le statu quo n’est pas conseillé.
Mme Teare est d’avis que «le gouvernement sous-finance délibérément le régime de retraite à prestation déterminée des travailleuses et des travailleurs des foyers de soins», une manière de justifier l’imposition d’un régime à cotisations déterminées (risque partagé).
D’après la présidente du CSFSNB, il s’agit pourtant d’un modeste régime de retraite dont la moyenne annuelle des prestations versées aux travailleurs est de 7300 $.
«Nous travaillons fort, nous faisons de notre mieux, nous sommes les moins bien payés et maintenant le gouvernement veut nous enlever l’un des acquis les plus importants de notre convention collective, déplore Mme Teare. J’aimerais pouvoir demander à M. Higgs ce qu’il déteste tant chez les travailleurs des foyers de soins afin de comprendre ce qui explique son refus de s’asseoir avec eux et de discuter des recommandations qui pourraient assurer la viabilité de leur régime de retraite.»
Si la surintendante des pensions refuse d’intervenir dans le dossier, le SCFP affirme qu’il n’hésitera pas à porter l’affaire devant les tribunaux.
Le syndicat a d’ailleurs retenu les services de Murray Gold, avocat senior chez Koskie Minsky LLP, afin de les appuyer dans cette affaire.
«La plainte est solide, la raison d’être de la réglementation sur les pensions est de s’assurer que les régimes de retraite sont bien financés, c’est le minimum requis», lance Me Gold.
Difficile de payer davantage
Du côté de l’Association des foyers de soins du Nouveau-Brunswick (AFSNB), on reconnaît la gravité du déficit du régime de retraite.
«On tombe de plus en plus en déficit et on n’a pas vraiment de plan pour s’en sortir. Les foyers de soins sont des organismes sans but lucratif, alors c’est très difficile pour nous de payer davantage», dit Mike Keating, directeur général par intérim de l’AFSNB.
Une rencontre entre l’AFSNB, le premier ministre, le ministre du Développement social et le sous-ministre des Finances est bientôt prévue afin de chercher des pistes de solution, dit M. Keating. Une réunion du conseil d’administration de l’association doit aussi avoir lieu la semaine prochaine afin de décider de l’approche à privilégier.
Higgs combatif
Invité à réagir à la plainte déposée par le SCFP lors d’une mêlée de presse, le premier ministre Higgs n’a pas caché son aversion aux régimes de retraite à prestation déterminée.
«Je suis étonné qu’ils nous chantent encore le même refrain, a-t-il lancé en référence au syndicat. Si on regarde les 12 dernières années, nous avons beaucoup travaillé afin de changer les régimes de retraite et nous allons continuer de le faire parce que ça doit arriver.»
Invité à dire s’il estimait que le gouvernement avait une obligation légale ou une stratégie afin de combler le déficit, le premier ministre Higgs s’est contenté de dire qu’il avait «un plan pour corriger le régime de retraite», soit de le transformer en régime à risque partagé.
«C’est complètement inacceptable qu’un employeur, que ce soit le gouvernement ou n’importe qui d’autre, ne rencontre pas ses obligations envers les travailleurs et les travailleuses, surtout dans les foyers de soins où on peut parler d’un sous-financement chronique et des conditions de travail difficiles», a pour sa part réagi Kevin Arseneau, député vert de la circonscription de Kent-Nord.
Le chef par intérim du Parti libéral, Roger Melanson, a pour sa part estimé que le gouvernement avait la responsabilité légale de corriger le déficit du régime de retraite du CSFSNB.