Kris Austin, député progressiste-conservateur et ancien chef de la People’s Alliance. - Acadie Nouvelle: Alexandre Boudreau
Kris Austin suggère une fusion des réseaux de santé au caucus progressiste-conservateur
Kris Austin a proposé au caucus progressiste-conservateur de discuter d’une fusion des deux réseaux de santé lors d’une réunion du caucus à Miramichi, la semaine prochaine. Blaine Higgs affirme avoir rejeté sa requête.
L’ancien hef de la People’s Alliance veut lancer un débat sur le regroupement des réseaux de santé Vitalité et Horizon.
Il affirme aussi que cela devrait «respecter la Loi sur les langues officielles» et respecter la communauté linguistique d’une région donnée.
Il estime que les deux réseaux de santé sont «en compétition» en termes de ressources humaines et d’équipement.
Kris Austin a fait cette proposition en réponse à un courriel interne, obtenu par la CBC, qui demandait des suggestions pour la prochaine réunion du caucus progressiste-conservateur à Miramichi, la semaine prochaine.
«On m’a demandé, en tant que membre du caucus et en tant que député, de suggérer des façons d’améliorer le gouvernement et les services publics, et j’ai fait mes suggestions», confirme-t-il.
Blaine Higgs affirme toutefois qu’il n’y aura pas de discussions à ce sujet, et que la proposition de son député ne reçoit pas beaucoup d’appui au sein de son parti.
«Je pense que l’enjeu dont on discute est de coordonner la santé. Il ne s’agit pas d’une fusion, il n’y aura pas de discussion sur une fusion. Parce que ce n’est pas sur la table. Nous allons parler d’un système de santé intégré qui travaille de façon coopérative afin de continuer à hausser la barre de l’offre de services.»
La ministre de la Santé, Dorothy Shephard, a aussi affirmé que l’idée n’a pas fait l’objet de débats au sein du caucus.
«Je pense que j’ai mentionné que je n’aurai pas de conversation sur une fusion alors que j’ai déjà du pain sur la planche avec une crise en santé dans la province.»
Austin «en a encore à apprendre»
Daniel Allain, ministre des Gouvernements locaux et de la Réforme de la gouvernance locale, s’était réjoui de la dissolution de la People’s Alliance en mars (le parti a été reconstitué depuis).
«C’est une grande journée. Je suis fier que certains individus dans le parti de l’Alliance n’y croient plus», avait-il dit, en ajoutant qu’il voulait «sensibiliser» ses nouveaux collègues aux principes du Parti progressiste-conservateur.
Lors d’une entrevue mercredi soir, il dit que Kris Austin «est tout nouveau» et qu’il «en a encore un peu à apprendre» sur les valeurs de son parti, y compris la protection du bilinguisme officiel.
«C’est une idée qu’il a eu, et il n’est pas encore sensible à la manière… C’est un député qui ne connaît peut-être pas tous les effets de ce qu’il a dit. Donc c’est à moi, et à nous, membres du Parti progressiste-conservateur, de le sensibiliser.»
Le premier ministre Blaine Higgs a laissé planer la possibilité d’une fusion des réseaux de santé l’été dernier.
Daniel Allain s’est rendu au Centre hospitalier universitaire Dr-Georges-L.-Dumont pour rassurer le personnel et pour rejeter cette idée en mai 2021.
«(Kris Austin) n’était pas là l’année passée. (…) C’est une bataille que je ne veux pas vivre de nouveau, et je crois qu’on a besoin d’aller de l’avant avec la réforme de la santé, c’est notre priorité numéro un», indique Daniel Allain.
M. Austin croit qu’il est possible de regrouper les réseaux de santé tout en respectant les obligations du gouvernement envers les deux communautés de langues officielles.
«Je ne crois pas que ça peut se faire, et je crois qu’on aura certainement un bon débat. Pour moi, le dossier est clos. Je suis convaincu que ça ne va même pas faire l’agenda du caucus», dit Daniel Allain, qui dit avoir supprimé le courriel de son collègue dès qu’il l’a reçu.
Un réseau coriace
Le Réseau de santé Vitalité fonctionne en français et le Réseau de santé Horizon en anglais, mais les deux régies ont l’obligation de fournir des services dans les deux langues officielles.
Leurs hôpitaux offrent généralement des services dans des régions différentes, à l’exception de Moncton, où chaque organisation gère son propre hôpital.
Le juriste Michel Doucet, expert en questions linguistiques, affirme que la vision d’une régie de santé francophone remonte à la corporation hospitalière Beauséjour, à Moncton, dans les années 1970.
Cette idée a notamment survécu à la réforme des corporations hospitalières par le gouvernement de Bernard Lord en 2002, puis à la fusion de ces régies pour créer Vitalité et Horizon en 2008, sous la gouverne de Shawn Graham.
Me Doucet croit que le gouvernement se lancerait dans une bataille juridique «longue, coûteuse et inutile» s’il décidait de fusionner les régies.
Il explique que le droit des communautés linguistiques à leurs institutions de santé distinctes est protégé à la fois dans la Loi provinciale reconnaissant l’égalité des deux communautés linguistiques, ainsi qu’à l’article 16.1 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Le fait d’avoir des réseaux de santé distincts permet aux deux communautés linguistiques de recevoir des services et de travailler dans leur langue, mais il leur permet aussi de conserver une certaine gouvernance dans ce domaine.
«C’est une question de maintenir une souveraineté, de pouvoir développer la santé selon les besoins essentiels de la communauté francophone. Si on n’avait pas eu la corporation hospitalière Beauséjour et si on n’avait pas Vitalité, on aurait de la difficulté à maintenir un réseau de formation de médecins et de spécialistes en santé francophones au N.-B.»
Changement de couleurs, mais pas de principes
La députée verte de Memramcook-Tantramar, Megan Mitton, n’était pas surprise de la suggestion de Kris Austin.
«Même s’ils ont changé de couleur, c’est évident qu’ils n’ont pas changé leurs principes.»
Elle estime que le gouvernement doit cesser de centraliser la prise de décisions en matière de santé, ce qui se fait au détriment des communautés, selon elle.
«C’est un enjeu de langue, mais (il faut) aussi arrêter d’enlever la prise de décision de nos communautés. Il faut faire l’inverse, et amener le pouvoir plus proche de nos communautés.»
Selon Roger Melanson, chef du Parti libéral, il serait «problématique» que le premier ministre veuille discuter de cette idée de M. Austin.
«Au parti libéral, nous avons dit clairement que les deux régies de santé doivent demeurer.»