L’usine Twin Rivers d’Edmundston fait toujours l’objet de critique en raison des odeurs nauséabondes qu’elle produit. - Acadie Nouvelle: Bobby Therrien
Edmundston: quand des odeurs étouffent le centre-ville
Les odeurs de l’usine de pâtes et papier Twin Rivers, située en plein centre-ville d’Edmundston, continuent de faire des mécontents.
La papetière est actuellement dans un processus de renouvellement de son agrément d’exploitation sur la qualité de l’air. Le public est donc invité à envoyer des commentaires au ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux.
Pour certains, il s’agit de l’occasion rêvée d’aborder une fois de plus la question des odeurs à Edmundston.
Albert Roy est l’un de ces résidents qui dénoncent le rejet de ces odeurs. L’été dernier, M. Roy avait même manifesté publiquement son mécontentement au centre-ville.
«Mon objectif est de ramasser tout ce que je peux trouver comme information et développer des moyens de se faire entendre (…) Il faudrait que les gens commencent à se serrer les coudes et sortent dans la rue pour dire: “assez, c’est assez”.»
Le citoyen a en horreur ses visites au centre-ville en raison «de la puanteur» qui règne dans ce secteur de la municipalité. Selon lui, cette situation empêche les gens de profiter pleinement de ce que l’endroit a à offrir.
«J’ai été au centre-ville dernièrement et j’avais hâte de partir. Il y a une acidité dans l’air qui vient me chercher les sinus (…) C’est ironique, car, récemment, Edmundston a été choisie comme endroit où il fait le plus bon vivre au Canada. Je suis d’accord sur certains points, mais sur cet aspect-là, je ne suis pas d’accord.»
M. Roy ne souhaite pas que l’usine ferme ses portes, mais il soutient que des améliorations doivent être apportées une bonne fois pour toutes.
«Ils (Twin Rivers) disent qu’ils brûlent les odeurs à 85%. C’est bien beau, mais il y en a encore qui s’échappent.»
«La priorité numéro un»
Le maire Eric Marquis suivra le processus de consultation de près. Comme l’hôtel de ville est situé en plein centre-ville, il est bien placé pour faire état de la situation.
«Quand les vents sont en direction de l’hôtel de ville, on sent les odeurs. Ce n’est pas tous les jours, mais ça semble être le cas selon certains autres facteurs que l’on ignore.»
Même s’il estime que la relation de la Ville avec les représentants de Twin Rivers est bonne, il croit qu’il sera primordial de creuser cette question.
«Il faut s’asseoir avec la compagnie et le ministère de l’Environnement. C’est le dossier numéro un qui revient sur une base régulière avec Twin Rivers.»
«Le renouvellement de l’agrément sur la qualité de l’air va nous donner l’occasion d’entendre les dirigeants de la compagnie. On a besoin, comme conseil municipal, de comprendre ce qui se passe.»
Selon le maire Marquis, la Municipalité souhaite qu’un plan à long terme soit élaboré.
«Quand le ministère émet des permis d’exploitations, l’usine se doit de suivre la réglementation provinciale. Une chose que l’on peut regarder c’est: est-ce que la réglementation provinciale est assez sévère? On peut aussi aller voir quelle est la réglementation au niveau des odeurs, surtout le dioxyde de soufre (SO2) qui semble représenter la plus grande part du problème. C’est ce dont on veut discuter.»
D’après le maire, les odeurs ont un effet négatif sur le développement du centre-ville.
«Notre centre-ville est particulier, car en plus des odeurs, il y a aussi le camionnage lourd. Il ne faut pas se faire de cachettes avec ça. Si on regarde ce qui a été construit dans cette zone au cours des dernières années, il n’y en a pas beaucoup.»
Selon M. Marquis, des entrepreneurs qui auraient souhaité investir au centre-ville ont souvent fait marche arrière en raison des odeurs et des camions lourds.
Twin Rivers veut continuer de s’améliorer
De son côté, la direction de la papetière laisse entendre que des mesures ont été mises en place dans le passé afin de réduire les désagréments.
En 2014, par exemple, l’entreprise a investi des millions de dollars pour développer une technologie afin de réduire les odeurs d’environ 85%.
Malgré tout, Éric Carrier, gestionnaire du secteur environnement et technique chez Twin Rivers Paper, confirme que l’usine reçoit encore des plaintes de la population.
«Les gens peuvent nous laisser un message et, à l’intérieur d’un délai raisonnable, on les rappelle, on prend l’information et on vérifie s’il y a quelque chose dans nos opérations qui explique pourquoi ça sent plus fort à ce moment-là.»
Selon M. Carrier, l’usine s’est donnée comme objectif, depuis plusieurs années, d’expliquer les raisons derrière les odeurs et de tenter d’ apporter des améliorations.
Toujours selon Éric Carrier, les plaintes sont plus nombreuses en été. Selon lui, le rejet de matières odorantes dans l’air est surtout attribuable à un bris dans le secteur de la chaudière de récupération qui est directement impliquée dans le processus de fabrication de la pâte.
D’après les explication de M. Carrier, cette chaudière (boiler) permet de réduire l’empreinte environnementale en produisant de la vapeur avec les eaux de drainage et de lavage de la pâte (liqueurs) et diminue la consommation de ressources premières par la récupération des ingrédients nécessaires à la préparation de l’acide de cuisson des copeaux de bois.
«Notre chaudière brûle cette liqueur, mais brûle aussi des gaz qui viennent de nos réservoirs. Quand elle s’arrête en raison d’un problème, elle n’aspire plus ces gaz qui retournent dans l’atmosphère (…) La majorité du temps, c’est là que l’on va avoir des plaintes. C’est un événement qui n’est pas normal et ça n’arrive pas tous les jours non plus.»
Même si la compagnie a investi beaucoup afin de limiter cette problématique, M. Carrier mentionne que les commentaires des gens peuvent permettre de découvrir d’autres éléments à améliorer.
«On a réduit (les odeurs) de façon significative, mais on ne les a pas complètement éliminées. On évalue toujours ce qui les cause. C’est sûr qu’on ne peut pas arrêter nos machines, alors plus on est efficace dans nos opérations, moins d’événements causant des odeurs se produisent.»
Le processus d’examen de l’agrément sur la qualité de l’air, qui a lieu normalement tous les cinq ans, a débuté le 26 janvier.
Les commentaires reçus avant le 9 mars seront inclus dans le sommaire provisoire qui sera disponible à mi-chemin de la période de commentaires, qui prendra fin le 26 mai.
Le ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux consulteront ensuite les commentaires, fera un sommaire des enjeux et des réponses obtenues pour finalement en arriver à la préparation de l’agrément prévu et à une décision finale du ministre.