- Archives
L’aéroport de Bathurst est menacé de fermeture
La situation précaire de l’aéroport régional de Bathurst suscite de nombreuses réactions dans la région Chaleur, où plusieurs intervenants locaux s’inquiètent pour l’avenir de cette infrastructure jugée essentielle.
Cette inquiétude fait suite à la révélation de la situation financière difficile de l’aéroport par son conseil d’administration.
S’adressant devant les responsables de la Commission de services régionaux Chaleur (CSR), le PDG de l’aéroport régional de Bathurst, Jamie DeGrace, a indiqué mercredi soir qu’un déficit de près d’un million de dollars était à prévoir au cours de l’année 2023-2024.
«C’est sans précédent dans l’histoire de l’aéroport», a souligné le dirigeant.
M. DeGrace a précisé qu’une somme de 200 000$ était nécessaire pour que les opérations puissent se poursuivre au-delà du printemps.
Selon lui, la pénurie de pilotes (les transporteurs préfèrent desservir les grands centres en premier) ainsi que l’absence de liaisons quotidiennes entre Bathurst et Montréal sont en grande partie responsables de la situation difficile à laquelle fait face l’aéroport.
Les données fournies par M. DeGrace témoignent de l’ampleur du problème. En effet, le nombre de passagers est passé de 51 673 en 2014-2015 à seulement 15 000 en 2022-2023.
Bon nombre de voyageurs ont décidé de transiter par l’aéroport de Moncton plutôt que d’utiliser celui de Bathurst.
Quant aux ventes de carburant destiné aux avions, elles devraient chuter de 1,2 million $ en 2019-2020 à 380 000$ en 2023-2024.
«Ça va prendre encore du temps avant de retrouver un rythme normal. Ce que l’on vit actuellement est le résultat de la pandémie qui a poussé des pilotes à la retraite», a affirmé le PDG.
Le bilan montre des dépenses mensuelles de 181 000 $, tandis que les revenus ne s’élèvent qu’à 75 000 $, ce qui représente un déficit mensuel de 106 000 $.
«On opère à déficit. En fait il y a trois jours d’activités par semaine à l’aéroport où il n’y a pas de revenu», a souligné Jamie DeGrace.
Ce dernier en a surpris plusieurs en affirmant que les vols médicaux à partir de Bathurst – environ 300 par année – rapportent à l’aéroport un mince 70$ par opération, somme qui est insuffisante pour couvrir les frais d’entretien, par exemple lors de tempête de neige.
Une infrastructure cruciale pour les soins de santé
La direction du Réseau de santé Vitalité se dit préoccupée par les difficultés rencontrées par les dirigeants de l’aéroport régional de Bathurst.
«Nous redoutons l’impact qu’aurait la perte de cette infrastructure essentielle sur l’accès aux services de santé dans la région. Le transport aéromédical est précieux pour les patients qui ont besoin de soins d’urgence et qui ne peuvent pas être traités dans leur communauté», a déclaré France Desrosiers, la PDG de Vitalité.
Elle précise que l’aéroport facilite également la venue de médecins spécialistes, de médecins suppléants, de formateurs et de techniciens dans ses établissements.
«La présence de l’aéroport contribue à notre croissance économique et à notre prospérité. C’est une porte d’entrée mondiale pour le nord du Nouveau-Brunswick, il nous offre une connectivité mondiale ainsi qu’un avantage concurrentiel unique par rapport à d’autres régions», a déclaré Shirley de Silva, directrice du développement économique et du tourisme à la CSR Chaleur.
La Chambre de commerce Chaleur a rappelé l’importance de garder l’aéroport régional ouvert puisqu’une grande partie de ses membres et de la communauté d’affaires de la région et des régions environnantes utilisent régulièrement ses services.
Ottawa et Fredericton pourraient intervenir
Le député fédéral d’Acadie-Bathurst Serge Cormier a indiqué avoir eu une rencontre avec la direction de l’aéroport et le ministre fédéral du Transport il y a deux semaines à Bathurst.
Il ne rejette pas la possibilité d’une aide financière fédérale, soulignant que son gouvernement avait déjà accordé une somme de 1,5 million de dollars à l’été 2021 pour aider l’Autorité aéroportuaire à surmonter la crise de la COVID-19.
«J’espère que la province va participer rapidement à ce défi financier. Je vais quand même m’occuper personnellement de trouver des solutions aux problèmes, même si le fédéral a déjà fait sa part», a indiqué le député fédéral, tout en enjoignant la population et la communauté d’affaires de la région à fréquenter en plus grand nombre leur aéroport.
Le ministre des Transports du Nouveau-Brunswick, Jeff Carr, a déclaré avoir abordé la question avec le ministre fédéral des Transports, Omar Alghabra, et lui avoir exprimé le besoin d’un soutien accru pour les services aériens régionaux, en particulier dans la région de Bathurst.
Le député provincial de Bathurst-Ouest-Beresford, René Legacy, n’est pas surpris de l’élan de solidarité qui semble vouloir se dessiner autour de l’aéroport régional, qui a reçu ses premiers vols commerciaux en 1969.
«Cet élan de sympathie témoigne bien de l’importance de l’aéroport de Bathurst pour les institutions et les gens de la région Chaleur», a souligné René Legacy.
«La province, qui dort sur un surplus budgétaire record, doit s’impliquer pour assurer ce service essentiel et le ministère de la Santé devrait payer sa juste part pour le transport médical», a affirmé le député libéral.
La mairesse de Bathurst, Kim Chamberlain, a décrit la situation de l’aéroport comme étant désolante.
Elle a souligné l’obligation de la province de s’impliquer et de fournir une assistance financière en utilisant ses surplus budgétaires. Elle a martelé que l’aéroport ne pouvait pas fermer et que des solutions doivent être trouvées rapidement pour garantir sa survie.