Cette photo d'un policier de la GRC armé d'un semi-automatique en pleine opération dans le secteur Dalhousie de Baie-des-Hérons a fait le tour des médias sociaux mercredi. - Photo tirée de Facebook
Une opération policière sème la confusion dans le Restigouche-Est
Une opération policière menée par la GRC dans les communautés de Bois-Joli et Baie-des-Hérons a causé un certain vent de panique mercredi soir auprès de la population.
La GRC était dans la région de Bois-Joli mercredi afin d’enquêter sur un vol à main armée survenu la veille vers 20h dans le dépanneur Yatout de l’Avenue des Pionniers dans le secteur Balmoral. Un homme s’est alors présenté au guichet et a exigé le contenu du tiroir-caisse. Celui-ci a quitté les lieux avec une somme indéterminée avant l’arrivée des policiers.
En début de soirée mercredi, la présence policière s’est intensifiée dans ce secteur, mais également dans celui d’Eel River Dundee et de Baie-des-Hérons (secteur Dalhousie) puisque des informations laissaient sous-entendre que le suspect lié à ce vol pouvait s’y trouver.
Ces recherches ont mené à un déploiement rarement vu dans la région. Plusieurs agents ainsi que l’escouade canine ont notamment été dépêchés sur les lieux afin de participer à l’opération. Le suspect, que l’on croyait armé, a finalement été localisé dans le secteur Balmoral en fin de soirée puis mis en état d’arrestation sans incident.
Il s’agit de Jessy Selesse, 25 ans, de Balmoral. Il a comparu jeudi au Palais de justice de Campbellton afin de faire face à des accusations de vol qualifié. Il restera détenu jusqu’à sa prochaine comparution prévue le 20 mars.
Vent de panique
La gestion de cette opération policière en laisse plusieurs songeurs.
C’est qu’entre le début des recherches et l’arrestation du suspect mercredi, le niveau d’anxiété a monté d’un cran dans l’ensemble du Restigouche-Est. Propulsée par les médias sociaux, l’information comme quoi un suspect armé était recherché s’est répandue comme une traînée de poudre. N’étant pas au courant des développements de l’opération policière, certains commerces ont même pris l’initiative de fermer plus tôt. De nombreux citoyens se sont pour leur part barricadés dans leur résidence. Ce n’est qu’après 23h que la GRC est sortie de son mutisme pour aviser qu’un suspect avait été arrêté.
Tout au long de l’intervention, bon nombre de personnes ont manifesté – par le biais des médias sociaux – leur mécontentement d’être ainsi gardés dans l’ignorance par les forces de l’ordre. Certains ont même déploré l’absence du déclenchement d’une alerte d’urgence.
Manque de communication
Maire de Baie-des-Hérons, Normand Pelletier ne reproche pas à ses citoyens d’avoir cédé à la panique.
«Comme tout le monde, j’ai suivi la situation sur les médias sociaux. J’ai vu les publications apparaître comme quoi des commerces fermaient leurs portes et même des photos, dont celle d’un policier avec un semi-automatique dans les mains dans ma propre communauté. Je ne peux pas blâmer les gens d’avoir eu peur, c’est stressant comme situation», avoue le maire.
Celui-ci croit que la GRC aurait dû gérer la situation autrement, ne serait-ce qu’au chapitre des communications.
«Je n’ai rien vu de leur part. Aucun avis à la population quant à un possible danger ou simplement pour rassurer les citoyens. Personne à la GRC n’a jugé bon écrire un mot sur Twitter ou Facebook, ou encore entrer en contact avec la municipalité pour nous aviser qu’une opération était en cours. On aurait pu aider, servir de courroie de transmission et rassurer notre population», indique le maire.
Son homologue de Bois-Joli, Mario Pelletier, a vécu la même situation. La veille, il a répondu à de nombreux appels et textos de la part de citoyens inquiets.
«Je n’avais pas grand-chose à leur dire par contre, car je ne savais pas ce qui se passait moi-même», témoigne-t-il.
Jeudi, il a rencontré la direction de la GRC de Campbellton afin de faire le point sur cette situation.
«Je comprends qu’on ne peut pas tout nous dire lorsqu’il y a une opération en cours, mais ce qui est clair, c’est qu’il y a eu un manque de communication de la part de la GRC auprès de la population et des municipalités. Ce n’est pas normal de ne pas avoir été avisé, mais surtout déplorable d’avoir laissé la situation dégénérer sur les médias sociaux pendant des heures», indique le maire, insistant sur le fait que la GRC doit tirer des leçons de cet incident.
Il se dit prêt à travailler avec la GRC afin de trouver des solutions afin d’éviter qu’une telle erreur se reproduise.
«Il faut que la GRC évite à l’avenir de laisser les citoyens dans le noir comme ce fut le cas mercredi. C’est une question de sécurité, mais aussi de respect. Mercredi, il fallait abaisser la tension dans nos communautés et ça n’a pas été fait», dit-il.
Ne pas contribuer à la désinformation
Invité à commenter ce dossier, le caporal Hans Ouellette de la GRC a avoué que l’intervention policière a connu certains défis en matière de communication.
«On réévalue constamment nos pratiques après nos interventions afin de les améliorer. C’est certain qu’on va revenir sur celle-ci afin de voir si on aurait pu faire certaines choses autrement», souligne-t-il.
Selon le policier toutefois, beaucoup de fausses informations ont été véhiculées et partagées mercredi dans les médias sociaux. La population doit également en tirer des leçons.
«Le public joue un rôle important dans le partage de l’information. Il faut par contre faire attention de ne pas contribuer aux rumeurs et à la désinformation en spéculant sur des circonstances ou même en publiant des photos d’où se trouvent les policiers durant leur enquête», mentionne-t-il, invitant la population à faire preuve de retenue.
En ce qui concerne les critiques touchant à l’absence d’un message En alerte, le policier soutient que l’intervention en question ne répondait pas aux critères d’un tel envoi.
«On est toujours prêt à utiliser cette méthode si le besoin s’en fait ressentir et si l’on juge qu’il y a un risque immédiat pour la sécurité du public. Dans ce cas-ci, il n’y avait pas un tel risque sinon nous aurions publié une alerte», précise M. Ouellette.