L’humoriste Luc LeBlanc - Gracieuseté
Humoriste: le plus beau métier du monde?
Qu’est-ce qui pousse un comédien à monter sur scène pour faire rire les gens? Une question qui soulève la passion de deux vétérans de l’humour Luc LeBlanc et Ryan Doucette qui se produisent au Festival HubCap.
Avant même de savoir qu’il se dirigeait vers une carrière artistique, Ryan Doucette rêvait d’être humoriste tout jeune. Malgré les défis, c’est le plus beau métier du monde, estime-t-il. Il n’y a pas de meilleur sentiment que d’être sur scène pour faire en sorte que les gens se sentent bien. À son avis, il n’y a rien de comparable comme émotion.
L’humour est une forme d’art délicate et de vulnérabilité où l’artiste est à la fois écrivain, producteur et performeur.
«C’est une des formes d’art les plus pures, tu ne peux pas mentir à la foule, tu ne peux pas porter de masque quand tu joues», a confié l’artiste originaire de Clare en Nouvelle-Écosse, maintenant établi à Charlottetown.
Comédien, scénariste, réalisateur, chroniqueur et humoriste, Ryan Doucette a commencé à faire du stand-up à Los Angeles en 2012.
Aujourd’hui, c’est principalement en français qu’il se produit en humour, même si sa carrière d’acteur évolue dans les deux langues. Il aime tellement le métier d’humoriste qu’il a réalisé la série télévisée Le sens du punch pour en connaître davantage sur sa discipline et la valoriser.
«C’est une forme d’art qui paraît simple quand c’est bien fait, mais je ne pense pas que le monde réalise le parcours que ça prend pour s’y rendre à cette simplicité-là. Je pourrais en parler pendant des heures tellement j’adore ma discipline.»
Qualifié de déconcertant, son humour peut parfois déstabiliser. C’est d’ailleurs, un peu ce qu’il recherche. En humour, quand c’est trop prévisible, ça ne fonctionne pas, rappelle l’artiste.
«Quand j’écris […] j’aime provoquer des images et donc si tu as une image dans ta tête, et que moi je suis capable d’insérer quelque chose que tu ne voyais pas venir, je pense que c’est plus payant pour moi et pour la blague. Et aussi ça garde l’intérêt.»
Son prochain spectacle, dont il donnera un aperçu pendant le festival, portera, entre autres, sur le passé, le futur et le thème de l’honnêteté. Étonnamment, l’expérience acquise ne rend pas l’écriture plus facile.
«Quand on commence, on a un genre d’ignorance, on est jeune, on embarque sur scène puis on n’a peur de rien. On dirait que je me mets plus de pression sur moi-même avec chaque prestation parce que je souffre beaucoup du syndrome de l’imposteur. Je pense que plus on connaît un domaine, plus on réalise qu’on ne connaît rien du domaine.»
«Tu peux faire des punchs faciles, choisir la route évidente ou décider d’aller dans des sentiers moins connus. Quand tu fais ces choix-là, c’est là où ça devient plus difficile.»
Préférant la polyvalence, il ne se verrait pas juste être humoriste. Que ce soit comme comédien, réalisateur, humoriste ou scénariste, il est sur la route environ six mois par année. «Je veux réaliser, écrire et être comédien, je ne pense pas que c’est possible de vivre juste de l’humour aux Maritimes.»
La scène acadienne en croissance
Selon Ryan Doucette, la scène humoristique a beaucoup évolué en Acadie. Tout comme les amateurs, les humoristes se sont développés et comprennent mieux maintenant les mécanismes du stand-up.
«Avant le monde voulait des sketches, des personnages et des perruques. Je pense que les gens qui s’embarquent dans l’humour le comprennent mieux aussi que ce n’est pas juste de dire des blagues, il y a quelque chose d’autre qu’il faut trouver dans sa personnalité et sa performance.»
L’humoriste Luc LeBlanc qui œuvre aussi en théâtre et au Pays de la Sagouine a fait longtemps de l’humour à sketchs. Il y a dix ans, il s’est lancé dans le stand-up pour se présenter devant le public sans artifices. C’était au moment où Juste pour rire débarquait pour la première fois au Nouveau-Brunswick et dans d’autres régions du pays. L’agence avait alors créé les Rendez-vous de la francophonie.
Il note que le Québec est de plus en plus ouvert à l’humour de l’Acadie.
«Au début, le Québec n’était pas convaincu qu’il y avait du stand-up ici, surtout en français. Ils ont vu ce qu’on faisait et ils ont constaté que c’était bon», a raconté le Restigouchois établi à Dieppe.
Depuis, plusieurs humoristes comme Éric Chiasson, Nathan Dimitroff et le regretté Martin Saulnier ont pu se produire sur la scène québécoise. Selon Luc LeBlanc, les humoristes acadiens ont acquis de la confiance. À son avis, ils sont beaucoup plus solides aujourd’hui quand ils montent sur scène. Celui qui a maintenant un agent à Montréal a envie de développer davantage sa carrière d’humoriste, même s’il n’envisage pas de déménager au Québec.
«Ce n’est pas facile parce que j’ai ma famille, j’ai fait toute ma vie ici. Mon intérêt n’est pas de dire je m’en vais à Montréal et je fais du stand-up, mais d’avoir un volet stand-up dans ma vie, ça oui. En faisant ça avec François Simard (Juste pour rire), ça me permet d’aller un peu partout.»
Des défis
Avec Julien Dionne, Luc LeBlanc projette d’organiser un gala mensuel dans différentes régions de la province. Il estime que le grand défi demeure la viabilité des spectacles d’humoristes locaux et constate un certain essoufflement.
«Je crois qu’il y a de l’intérêt par rapport au bar et aux salles de faire des spectacles d’humour, mais on n’est pas encore rendu au point où c’est viable. […] On s’en vient, mais on n’est pas là encore.»
L’artiste qui combine l’écriture, le théâtre, la télévision, voit mal comment il pourrait arriver à vivre juste de l’humour, à moins d’écrire du nouveau matériel chaque année ou de se lancer dans les spectacles corporatifs.
«Je ne veux pas décourager les humoristes de faire ça, je crois que c’est tout le temps possible, mais il faut se retrousser les manches et il y a du travail à faire.»
Celui qui vient de franchir le cap de la cinquantaine prépare un nouveau spectacle qui tournera autour de son demi-siècle d’existence. Si dans Boosté, il jouait sur le fait d’être une personne hyper énergique, à 50 ans, les choses commencent à ralentir, souligne celui qui présentera quelques nouveaux numéros au Gala Vendredi soir pour rire qu’il anime.
Conteur efficace, Luc LeBlanc ne cherche pas nécessairement à enfiler blague après blague. Il aime interagir avec le public et installer un fil conducteur tout en restant dans l’humour.