En cette semaine du Salon du livre à Dieppe, je vous présente les ouvrages de deux autrices invitées qui abordent des thématiques autour de la guerre. Tout d’abord le plus récent roman de Perrine Leblanc qui prend son inspiration en Irlande du Nord et puis, un conte, celui de Marie-France Comeau sur le Jour du Souvenir.

Gens du Nord, Perrine Leblanc

Pour son quatrième roman, Perrine Leblanc s’aventure en Irlande du Nord, en traitant du conflit entre catholiques et protestants, entre les royalistes fidèles à la couronne britannique et les nationalistes favorables à l’indépendance. L’autrice québécoise offre un roman très étoffé qui permet de mieux comprendre les dessous de ces luttes ayant duré plus de trois décennies. Bombes, enlèvements, tirs, soulèvements de foules, check-points, harcèlement, arrestations aléatoires, exécutions et j’en passe.

Nous sommes en 1991 près de Belfast. Le roman s’ouvre violemment sur la capture et l’exécution de Samuel Gallagher, un écrivain irlandais engagé auprès des forces nationalistes. L’écrivain a été enlevé par une cellule d’un groupe paramilitaire protestant (UVF). John O. Fox, un agent infiltré, a pour mission d’exécuter Samuel Gallagher.

«Il a visé. Il a inspiré en silence sans faire bouger ses épaules et il a retenu son souffle. Dans l’intervalle séparant deux battements de coeur il a tiré, et il a enfin expiré. L’autre ne contrôlait plus rien, il s’est pissé dessus avant de tomber.»

Après son assassinat, l’écrivain devient en quelque sorte un symbole de la cause nationaliste. Le corps du martyr n’a jamais été exposé et seule sa copine a pu le voir. Pendant ce temps, une jeune cinéaste québécoise, Anne Kelly, fascinée par le martyr, travaille à un projet de documentaire sur Samuel Gallagher avec un collègue journaliste. Elle part à la recherche de son sujet dans un climat de tension. Bien des obstacles se présentent sur sa route lorsqu’elle tente de réaliser des entrevues en Irlande. Pas facile de naviguer à travers ce monde de secrets où les menaces sont bien réelles. Personne ne veut qu’elle découvre la vérité.

Au cours de son périple avec des allers-retours au Canada, en France et en Irlande, elle fait la rencontre du journaliste français, François Le Bars, un habitué des zones de guerre qui a couvert plusieurs conflits, dont celui de l’Irlande. Ce dernier qui trouve son compte dans les poudrières du monde et les histoires d’amour éphémères se lie sur le terrain avec des hommes qui renseignent l’État et d’autres qui militent pour la décolonisation de l’Irlande du Nord. Le journaliste l’accompagne dans ses recherches tout en tentant de la protéger. Un amour naîtra entre François et Anne.

Au-delà du conflit, l’autrice qui a des origines irlandaises nous fait découvrir la beauté et la culture de l’Île d’émeraude au mille tons de vert, ce pays du «soda bread».

L’accord de paix signé en 1998 à Belfast a mis fin au conflit, bien que l’Irlande du Nord fasse toujours partie du Royaume-Uni. L’IRA a enterré les armes en 2005 et les groupes paramilitaires loyalistes ont cessé leur campagne armée en 2007.

Bien que Gens du Nord soit une fiction, Perrine Leblanc a sillonné les routes de l’Irlande et mené énormément de recherches sur le terrain pour appuyer son récit. C’est un conflit compliqué avec des espions et des agents doubles. Perrine Leblanc est une écrivaine qui se démarque avec une plume précise, percutante, jamais larmoyante, optant plutôt pour l’action et les faits. Il faut bien sûr être attentif à tous les petits détails et je dois admettre qu’on peut parfois se perdre dans cette montagne d’informations. C’est un roman captivant et tellement pertinent. En lisant son livre, on se dit que la paix est bien fragile.

Le premier roman de Perrine Leblanc, L’homme blanc, a été récompensé du Prix littéraire du Gouverneur général. Gens du Nord est en lice pour le Prix des cinq continents. (Gallimard, 2022) ♥♥♥♥

Un bisou coquelicot, Marie-France Comeau et Jean-Luc Trudel

Comment expliquer aux enfants ce qu’est le Jour du Souvenir? L’autrice acadienne de la baie des Chaleurs s’est lancé ce défi avec son nouvel album jeunesse illustré par Jean-Luc Trudel. Dans Un bisou coquelicot, elle raconte l’histoire d’Aly et de son arrière-grand-père, un vétéran de la Deuxième Guerre mondiale. Le matin du 11 novembre, son papi s’est fait tout beau, avec son béret sur la tête et ses médailles bien accrochées sur son veston. La petite Aly découvre ainsi la signification de ces médailles. «Cling, clang, cling… le cliquetis transporte papi de l’Acadie à la Normandie.»

Il se remémore ainsi son départ pour la Normandie alors qu’il était jeune, quittant sa famille. «Ma mère pleurait, mais moi, j’étais si fier. J’allais apporter la paix là où il y avait la guerre», raconte-t-il à l’enfant.

Lorsque papi lui raconte ses souvenirs de guerre, Aly regarde son arrière-grand-père avec admiration. «Tu es plus courageux que Super-Woman et Spider-Man ensemble», lui dit-elle. Le 11 novembre lui permet de faire la paix avec ses souvenirs.

C’est une histoire touchante multigénérationnelle remplie de tendresse, illustrée en douceur. Marie-France Comeau est aussi l’autrice de L’étoile dans la pomme, Diego l’Escargot et Le Pit à papa. Jean-Luc Trudel a créé les illustrations, entre autres, de Tommy Tempête et Mémère Soleil. On reconnaît bien son style dans ce nouvel album. Un bisou coquelicot s’adresse aux enfants de 4 à 8 ans. (Éditions Bouton d’or Acadie, 2022). ♥♥♥½

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