Reese Witherspoon et Ashton Kutcher se font la cour dans la comédie romantique Your Place or Mine (Netflix). - Gracieuseté
Your place or mine: un (autre) triste exemple de cinéma à numéros
Je ne suis vraiment pas impressionné par ce que Netflix nous offre depuis deux ans. Le géant de la diffusion en continu priorise les gros noms à la qualité, ce qui se traduit par des films extrêmement superficiels comme Your Place or Mine, avec Reese Witherspoon et Ashton Kutcher.
Witherspoon (Legally Blonde, Walk the Line) et Kutcher (No Strings Attached, That 70’s Show) sont des icônes du cinéma romantique moderne. À leurs deux, ils ont probablement joué dans une vingtaine de comédies sentimentales, sans toutefois jamais se donner la réplique.
Dans Your Place or Mine, la Louisianaise interprète Debbie, une maman célibataire comptable à la vie rangée. Son meilleur ami est Peter (Kutcher), un homme avec qui elle a eu une aventure d’un soir il y a 20 ans et qui, depuis, multiplie les relations éphémères.
Depuis, Debbie vit à Los Angeles et Peter à New York. Un jour, pour suivre un cours dans le cadre de son travail, Debbie doit passer une semaine dans la Grosse Pomme. Debbie n’ayant pas trouvé de gardien pour son garçon, Peter s’offre de faire le travail. Ils échangent donc leurs demeures pour quelques jours. Quelques jours qui transformeront à jamais leur vie personnelle, sentimentale et professionnelle…
On ne peut pas dire que le scénario de Your Place or Mine brille par sa subtilité. Après 20 minutes, on a déjà une très bonne idée de comment le film va se terminer. S’en suit un long et ennuyeux deuxième acte, suivi d’une finale qui ressasse tous les clichés du genre – de l’éternel malentendu entre les tourtereaux à leur réconciliation à l’aéroport.
Le scénario déborde aussi d’incongruités. Il ne tient, par exemple, jamais compte du décalage horaire entre New York et LA. Et où Debbie, mère célibataire qui travaille à temps plein, a-t-elle trouvé le temps de lire tous les livres d’une maison d’édition?
Mais à quoi bon se torturer les méninges à pondre un scénario original et crédible quand, de nos jours, Netflix juge que la qualité d’un film est très secondaire parce qu’il suffit d’une ou deux vedettes au générique pour attirer l’attention des abonnés potentiels?
C’est ce qui explique l’avalanche de films à numéros qui nous sont offerts ces temps-ci: les histoires sont pratiquement toujours les mêmes, seuls les comédiens changent.
Your Place or Mine est d’ailleurs est variation du supérieur The Holidays (2006), avec Kate Winsley et Jude Law.
Ce n’est pas non plus une comédie romantique, c’est un film fantastique – ou de science-fiction – dans lequel la pensée magique suffit à améliorer la vie déjà privilégiée de belles personnes…
On ne peut pas non plus dire que Kutcher et Witherspoon se renouvellent. Le premier joue à nouveau l’adolescent attardé tombeur. Quant à la seconde, elle incarne – encore – la femme débordée, mais toujours impeccablement coiffée et maquillée, magnifique, mais célibataire, un peu névrosée, mais dotée d’un grand coeur.
En fait, les deux stars sont tellement sur le pilote automatique qu’elles se font voler la vedette par Steve Zahn, Zoe Chao et surtout Tig Notaro, beaucoup plus engagés et drôles dans des rôles secondaires.
Les romantiques finis apprécieront probablement quand même cette oeuvre d’une banalité criminelle et dépourvue de toute valeur artistique. Les autres voudront absolument éviter.
(Deux étoiles sur cinq)
Alice, chérie
Le quotidien des femmes coincées dans une relation intime toxique est fait de peur, d’angoisse et d’anxiété. La réalisatrice Mary Nighy le démontre avec beaucoup de doigté dans Alice, Chérie (Alice, Darling; disponible en vidéo sur demande).
Dans ce drame financé en partie par Téléfilm Canada et tourné à Peterborough, en Ontario, la grande vedette Anna Kendrick (de la saga Pitch Perfect, notamment) interprète Alice, une jeune femme aux prises avec un conjoint qui contrôle tous les aspects de sa vie.
Un jour, deux amies d’Alice l’invitent à prendre quelques jours de congé dans un chalet situé en bordure d’un lac. Convaincue que son conjoint refusera qu’elle s’y rende, Alice lui ment en lui disant qu’elle doit s’absenter pour le travail.
Au fil de ses crises d’angoisse, de ses souvenirs douloureux et de ses discussions avec ses copines, Alice finira par avouer du bout des lèvres qu’elle n’en peut plus. Mais comment se sortir d’un tel enfer quand votre compagnon est un manipulateur de niveau olympique?
Le film de Mary Nighy – une Britannique qui signe ici son premier long-métrage – n’est pas le plus divertissant, mais il a le mérite de nous faire réfléchir sur une problématique sociale trop souvent banalisée ou cachée.
La cinéaste nous rend témoins du caractère malsain de la relation d’Alice de façon très subtile. On ne voit en effet rien de bien terrifiant. Les crises de panique de la jeune femme (livrées avec énormément de brio par Kendrick) et sa grande vulnérabilité nous touchent toutefois droit au coeur.
Un film percutant, touchant et essentiel.
(Quatre étoiles sur cinq)