Ariel (Halle Bailey) chante son amour pour le prince Eric dans une scène de La Petite Sirène. - Gracieuseté
La Petite Sirène: puissant appel à l’ouverture
Dans la guerre que livre le gouverneur floridien Ron DeSantis à Disney, je suis fièrement dans l’Équipe Mickey Mouse.
Depuis plusieurs mois, le controversé politicien républicain attaque Disney et ses efforts d’inclusivité – en mettant en scène des héros musulmans, noirs, latinos et de la communauté LGBTQ+, notamment.
DeSantis considère que le géant du divertissement est une menace pour la «culture américaine» – «culture» qui, bien sûr, est définie par les convictions religieuses et électoralistes de monsieur, donc blanche, protestante, anglophone et hétérosexuelle.
C’est dans ce contexte de guerre de mots culturelle que nous arrive le film en prises de vues réelles La Petite Sirène (en salles depuis vendredi), un remake du classique d’animation du même titre lancé en 1989.
Dans l’oeuvre originale – et dans le conte du Danois Hans Christian Andersen duquel elle est adaptée – Ariel, la femme-poisson, est blanche. Dans le nouveau film, la sirène est interprétée par une jeune comédienne noire, Halle Bailey (Sky de la série Grown-ish).
Un casting qui n’a évidemment pas fait l’unanimité, aux États-Unis, quand il a été annoncé en juillet 2019. Pour certains, une sirène – une créature fictive, faut-il le préciser – «ne peut anatomiquement pas avoir la peau noire». Par chance, le ridicule ne tue pas…
Coïncidence ou non, La Petite Sirène est un puissant appel à l’ouverture. Comme dans l’oeuvre originale, c’est l’histoire de la jeune Ariel, une femme-poisson qui est très curieuse à propos du monde des humains.
Ce monde lui est interdit puisque son père, le roi Triton (Javier Bardem), considère que les humains sont tous des barbares.
Sauf qu’Ariel n’est pas un symbole d’obéissance et une nuit, alors qu’elle observe un navire et son équipage, une tempête se lève. Elle nage alors au secours d’un beau marin, le prince Éric, passé par-dessus bord.
Déterminée à revoir son beau prince, Ariel passe un pacte avec sa manipulatrice tante Ursula (Melissa McCarthy). La sirène devient femme, mais elle a trois jours pour obtenir un baiser d’Eric, sans quoi, elle redeviendra poisson et esclave à jamais d’Ursula…
Les deux plus grandes qualités du film de Rob Marshall (Chicago, Mary Poppins Return, Pirates of the Caribbean: On Stranger Tides) sont la portée de son scénario et le jeu de la jeune Bailey.
Le film est un appel à l’ouverture, à la tolérance et au rejet des préjugés. À mes yeux, le scénariste David Magee (Life of Pi, Mary Poppins Return) aurait même pu marteler davantage son message, question qu’il soit bien compris de tous.
Quant à Bailey, on la croirait née pour jouer Ariel. Son interprétation est fantastique, surtout sur la terre ferme, quand elle se transforme en une muette charmante et maladroite. Elle est si convaincante qu’on oublie rapidement toute la controverse entourant la couleur de sa peau.
L’humour est aussi un point fort du film. Le crabe Sébastien et, surtout, le goéland Eurêka sont particulièrement hilarants.
Tout n’est cependant pas parfait. Les effets visuels sont par moment décevants. En fait, les scènes sous-marines ne sont pas du même calibre que celles de films récents comme Avatar 2, Aquaman et Black Panther: Wakanda Forever.
Javier Bardem est de plus peu dynamique dans le rôle du roi. Et ça chante beaucoup trop souvent et longtemps. Des irritants, certes, mais qui ne suffisent pas à gâcher ce qui est un remake très réussi d’une oeuvre au message indémodable.
(Trois étoiles et demie sur cinq)
Sisu: de l’or et du sang
Hommage au cinéma de Quentin Tarantino, le drame finlandais Sisu: de l’or et du sang (disponible à la location, notamment sur Apple TV+) est un sympathique divertissement.
Le film raconte l’histoire d’Aatami (Jorma Tommila), un ancien commando qui, en 1944, las de la guerre, devient prospecteur d’or en Laponie (la région la plus au nord de la Finlande).
Après avoir découvert et foré une gigantesque veine d’or, Aatami reprend la route de la civilisation. Sauf qu’en chemin, il se heurte à une unité de vicieux soldats allemands. Quand ceux-ci lui volent son butin, le foreur contre-attaque. Sauvagement…
Joyeux mélange entre Kill Bill (2003) et Inglorious Basterds (2009), deux oeuvres de Tarantino, Sisu est un film dans lequel un homme assouvit sa vengeance de façon violente et sanguinaire sur un groupe de nazis. L’hémoglobine coule à flots, parfois grâce à des moyens fort originaux.
Ce western finlandais, tourné dans la toundra, est toutefois bien plus qu’une simple enfilade de morts horribles. Les images sont en effet magnifiques, le Grand Nord et son panorama étant exploités au maximum.
C’est aussi un film sans dialogues inutiles. En fait, le personnage principal ne parle qu’à deux reprises! Chapeau à Jorma Tommila, qui parvient à exprimer toute sa rage, sa douleur et sa frustration par sa simple gestuelle.
Pour un film qui n’est qu’un prétexte à mettre en scène des séquences violentes, j’ai vu bien pire.
(Trois étoiles et demie sur cinq)