La banque centrale a expliqué que sa décision de laisser son taux de financement à un jour à 4,50% s’appuyait sur les récentes données économiques. - La Presse canadienne: Sean Kilpatrick
La Banque du Canada maintient son taux d’intérêt directeur à 4,50%
La Banque du Canada a laissé mercredi son taux d’intérêt directeur inchangé pour la première fois en un an, s’en tenant à son approche attentiste même si son homologue américaine trace une voie plus dynamique.
La banque centrale a expliqué que sa décision de laisser son taux de financement à un jour à 4,50 % s’appuyait sur les récentes données économiques.
«Le conseil de direction va continuer d’analyser l’évolution de l’économie et les répercussions des hausses qu’il a effectuées jusqu’ici, et se tient prêt à relever encore le taux directeur si cela est nécessaire pour ramener l’inflation à la cible de 2 %», a-t-elle expliqué dans un communiqué.
La banque centrale a rapidement haussé son taux d’intérêt directeur dans les 12 derniers mois, le faisant passer de près de zéro à son plus haut niveau depuis 2007.
En janvier, la Banque du Canada avait indiqué s’attendre à maintenir son taux directeur si l’évolution de l’économie se montrait généralement conforme aux perspectives présentées dans ses prévisions.
Une vaste majorité d’économistes s’attendaient à ce que la Banque du Canada maintienne son taux mercredi, notant qu’il serait trop tôt pour hausser les taux de nouveau. L’économie a en outre évolué dans la bonne direction pour la banque centrale, qui veut ralentir l’activité économique.
«Il n’y a vraiment pas eu de surprises importantes ici», a observé l’économiste en chef de la Banque de Montréal, Douglas Porter.
La politique de la Banque du Canada commence à diverger de celle de la Réserve fédérale des États-Unis, qui a annoncé récemment son intention de continuer à augmenter les taux d’intérêt.
La politique monétaire américaine a des implications pour le Canada, a souligné Stephen Gordon, professeur d’économie à l’Université Laval. Des taux d’intérêt plus élevés aux États-Unis pourraient y attirer des investissements, affaiblir le dollar canadien et augmenter les prix des importations pour le Canada.
Mais M. Gordon prévient que «ce n’est pas une chose automatique, la (Banque du Canada) n’est pas obligée de suivre la Fed».
De récentes données ont montré que l’inflation annuelle avait ralenti à 5,9 % en janvier et que l’économie avait réalisé une croissance nulle au quatrième trimestre.
La banque centrale a souligné que «le marché du travail (restait) très tendu», mais a dit s’attendre à ce qu’il s’assouplisse et que la croissance des salaires se modère.
M. Porter a ajouté que l’enquête sur la main-d’œuvre de février, qui doit être publiée vendredi, montrerait plus clairement si les 150 000 emplois ajoutés en janvier représentaient un coup de chance ou une force sous-jacente du marché du travail.
La Banque du Canada s’attend toujours à ce que l’inflation annuelle ralentisse aux environs de 3,0 % d’ici la moitié de l’année.
Ralentissement attendu de l’inflation
M. Gordon a estimé qu’il faudrait une «surprise» pour que la Banque du Canada décide d’augmenter davantage les taux d’intérêt.
À moins d’événements imprévus, l’inflation au Canada devrait continuer de ralentir cette année en raison de l’effet de glissement annuel.
Cet effet désigne l’incidence qu’ont les fluctuations de prix enregistrées 12 mois plus tôt sur l’inflation globale des prix à la consommation du mois courant. Lorsque les prix ont fortement grimpé au cours du mois de référence, cela a un effet à la baisse sur l’indice des prix à la consommation global du mois courant.
Puisqu’une grande partie de l’accélération de la croissance des prix s’est produite au premier semestre de 2022, alors que la menace d’invasion de l’Ukraine par la Russie s’est concrétisée, l’inflation annuelle devrait continuer à ralentir dans les mois à venir.
«En ce moment, nous pouvons nous attendre à ce que l’inflation continue de ralentir», a affirmé M. Gordon.
Les hausses de taux d’intérêt peuvent également prendre jusqu’à deux ans pour se faire pleinement sentir dans l’économie, ce qui signifie que l’économie a besoin de plus de temps pour réagir aux hausses précédentes.
La Banque du Canada a ajouté que, sur une base mondiale, l’économie avait généralement évolué conformément à ses prévisions. Cependant, la vigueur de la reprise en Chine et l’impact de la guerre russe en Ukraine représentent toujours «d’importantes sources de risques à la hausse» pour l’inflation.
En perspective, M. Porter a souligné qu’il y avait des «limites» à la divergence entre la Banque du Canada et la Réserve fédérale. Il a également noté que les économies étaient liées et subissaient des pressions similaires, ce qui signifie que si un pays a besoin de taux d’intérêt plus élevés, l’autre en aura probablement aussi besoin.
«Si l’économie américaine montre vraiment plus de vigueur sous-jacente et de plus fortes pressions inflationnistes, cela finira probablement par se refléter au Canada également», a-t-il noté.
La Banque du Canada annoncera sa prochaine décision sur son taux directeur le 12 avril, et celle-ci sera accompagnée d’une mise à jour de ses prévisions dans son rapport trimestriel sur la politique monétaire.