Le secteur culturel a réalisé d’importants progrès dans les 20 dernières années. Les artistes savent cependant qu’ils devront faire preuve de patience avant de voir des changements gouvernementaux avoir un impact important sur leur qualité de vie. Les objectifs sont bien définis. La voie pour s’y rendre est longue et sinueuse.

L’Acadie Nouvelle a rencontré cette semaine Carmen Gibbs et Philippe Beaulieu, de l’Association acadienne des artistes professionnels du Nouveau-Brunswick, dans le cadre d’une rencontre éditoriale. Elle nous a permis d’en apprendre plus sur l’état du monde culturel acadien et les façons d’améliorer le sort de nos artistes.

L’Acadie est une nation sans frontière qui se définit surtout par sa langue, mais aussi par sa culture. C’est beaucoup grâce à ses artistes si elle rayonne à travers le monde.

Bonne nouvelle, nos gouvernements semblent l’avoir compris.

L’Association acadienne des artistes professionnels reconnaît que des pas de géants ont été accomplis depuis l’époque pas si lointaine où un ministre racontait sans aucune gêne que la culture, «c’est comme le glaçage sur du gâteau». Une façon méprisante d’exprimer que les arts sont une sorte de luxe, sans aucune importance au sein de notre société.

Beaucoup a été accompli depuis les États généraux des arts et de la culture de 2007, à Caraquet. D’importantes réalisations ont vu le jour, dont certaines ont eu un impact concret sur le portefeuille et la visibilité de nos créateurs. À titre d’exemple, le nombre de présences d’artistes dans les écoles francophones est passé de 102 en 2009-2010 à 1711 en 2013-2014. La différence est énorme. Cela témoigne d’une sensibilité au milieu culturel qui était moins présente il y a une décennie dans nos institutions.

Le plus important changement se retrouve peut-être dans l’attitude du gouvernement provincial. Mme Gibbs et M. Beaulieu affirment être aujourd’hui capables d’obtenir rapidement une rencontre avec le premier ministre Brian Gallant ou un ministre d’importance. Pour reprendre leurs mots, ils se sentent «écoutés et respectés».

Cela ne signifie pas que ceux-ci se rendent à leurs arguments. Les dépenses réservées aux arts, à la culture et au patrimoine ont encore une fois été gelées cette année, et ce, alors que le gouvernement Gallant a pourtant ouvert les vannes en cette année préélectorale.

Les canaux de discussion sont toutefois ouverts. C’est une donnée importante, car l’association des artistes aura besoin de l’aide de Fredericton si elle souhaite atteindre ses ambitieux objectifs.

En effet, celle-ci a tourné ses yeux vers Ottawa. Elle souhaite que le provincial et le fédéral arriment des politiques fiscales qui avantageraient les artistes non seulement en Acadie mais à travers  le Canada.

Pendant notre rencontre éditoriale, l’exemple du secteur des pêches est revenu à quelques reprises. Cette industrie jouit de quelques privilèges qui ont contribué à son essor. Ainsi, les pêcheurs ont droit à un programme d’assurance-emploi adapté à leur situation, ne paient pas de taxes de vente sur l’essence, etc.

Les artistes souhaitent des mesures semblables. Cela prendrait la forme d’exemptions d’impôts sur leurs bourses et leurs droits d’auteurs ainsi que des modifications à l’assurance-emploi.

Le programme, par exemple, pourrait dans leur cas être basé sur leurs revenus et non sur leur nombre d’heures travaillées, puisque plusieurs d’entre elles ne sont pas rémunérées lors du processus de création (ce qu’ils appellent le travail invisible) et ne sont donc pas admissibles.

Ils verraient bien un projet-pilote être mis sur pied au Nouveau-Brunswick, avant d’être ensuite appliqué partout au pays.

L’Association acadienne des artistes professionnels du N.-B. est toutefois loin de pouvoir crier victoire.

Elle reconnaît d’ailleurs qu’il y a peu de chances que certaines des mesures dont elle fait la promotion (le revenu minimum garanti aux artistes, par exemple) soit adoptées de sitôt.

L’autre problème est que l’association est en mode «recherche», ce qui signifie qu’elle est incapable de chiffrer toutes ses demandes. Elle propose par exemple l’étalement des revenus, une mesure adoptée au Québec qui permet à un artiste qui a vécu une année exceptionnelle au chapitre des revenus de diviser ceux-ci sur plusieurs années afin de réduire sa facture d’impôts. L’association n’est néanmoins pas en mesure de préciser combien d’artistes acadiens font suffisamment d’argent pour profiter d’une telle mesure.

Même chose pour le revenu garanti, où on ignore encore qui aurait droit à l’argent des gouvernements et à partir de quels critères. L’association en est consciente et affirme faire ses devoirs.

Bref, si les objectifs sont clairs, les détails le sont un peu moins. La clef reste le gouvernement provincial. Sans son accompagnement, les artistes acadiens n’auront aucune chance de convaincre le fédéral d’accéder à leurs demandes.

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