François Gravel, éditorialiste
Un mauvais budget d’un gouvernement insensible
Le gouvernement Higgs continue envers et contre tous de faire les mauvais choix. Le budget provincial 2022-2023 n’apporte pas de solutions crédibles aux problèmes qui affligent le Nouveau-Brunswick.
Le ministre des Finances Ernie Steeves a déposé mardi un budget qui ressemble en tout point aux précédents. Il démontre l’indifférence du gouvernement devant les trois grands enjeux qui touchent la qualité de vie de bien des Néo-Brunswickois: la pénurie de personnel en santé, l’explosion du coût de la vie et la crise du logement.
Le ministre Steeves a tenté de donner le change en tentant de faire passer comme un grand accomplissement le fait qu’il prévoit augmenter de 10,6% ses dépenses en santé.
L’augmentation n’est toutefois pas complètement le fruit d’un choix budgétaire de Fredericton. Elle s’explique en grande partie par le fait que le gouvernement fédéral augmentera d’environ 200 millions $ ses transferts en santé cette année pour le Nouveau-Brunswick
De plus, Ottawa a bien fait comprendre aux provinces pendant les négociations qu’il ne tolérera pas que ces fonds soient redirigés vers d’autres portefeuilles ou employés au remboursement de la dette.
Preuve du sens des priorités tordues de ce gouvernement, une somme de 29,7 millions $ a été mise de côté pour le recrutement et la rétention de professionnels de la santé en provenance de l’étranger. Or, cette somme est inférieure aux 32,6 millions $ accordés aux forces policières pour combattre ce que Ernie Steeves qualifie de hausse «préoccupante» de la criminalité.
Surtout, elle est minime comparativement aux 350 millions $ annoncés cette semaine par le gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Celui-ci remettra cette somme aux infirmières, aux employés des foyers, aux travailleurs paramédicaux et à d’autres employés de la santé sous forme de primes de rétention pouvant totaliser jusqu’à 20 000$.
Dans les circonstances, nous comprenons la réaction du Syndicat des infirmières du Nouveau-Brunswick, qui a accueilli le budget Steeves comme une gifle.
Ce budget consacre par ailleurs la volonté du premier ministre Blaine Higgs de rendre le gouvernement moins interventionniste.
Le document financier ne comprend pas de plan pour combattre la crise du logement. Le gouvernement estime que l’explosion du coût des loyers n’est pas son problème et qu’il n’a pas à intervenir dans ce dossier. Il accorde plutôt 1 million $ au tribunal de location des locaux d’habitation pour gérer l’augmentation des demandes. Bref, il dit aux citoyens lésés de se débrouiller.
Même constatation en ce qui a trait à l’inflation. Le ministre Steeves a déjà annoncé il y a quelques mois une diminution d’impôts qui profitera surtout aux plus riches, estimant que cela suffira amplement. Seul rayon de soleil à travers les nuages, Fredericton maintient sa politique d’indexer les taux d’aide sociale.
En ce qui a trait à l’état des finances publiques, Ernie Steeves continue de se ridiculiser avec des prévisions fantaisistes qui ne valent pas le papier sur lequel elles ont été écrites.
Le ministre soutient que le gouvernement dégagera à la fin de la prochaine année fiscale un surplus d’un peu plus de 35 millions $. Il justifie cette prédiction en annonçant une extraordinaire chute de quelque 700 millions $ des revenus en provenance de l’impôt. Il faudrait pratiquement que l’économie néo-brunswickoise s’effondre pour que cela survienne. Ce n’est pourtant pas ce qui est prévu dans le budget Steeves, qui prévoit plutôt une hausse (certainement très sous-estimée) de 0,8% du produit intérieur brut.
Bref, ce gouvernement continue de nous cacher le véritable état de ses finances. Cela lui permet de commodément privilégier les priorités du premier ministre (remboursement de la dette, loi et ordre) au détriment d’à peu près toutes les priorités des citoyens.
Le gouvernement Higgs n’a encore une fois pas été à la hauteur. Son budget a été intitulé «Travailler dans l’intérêt des gens du Nouveau-Brunswick». Il fait plutôt le contraire.
C’est un mauvais budget rédigé par un gouvernement insensible. Ce dernier a encore une fois privilégié l’idéologie au détriment du bien-être de la population. Pire encore, il lègue à ses successeurs la responsabilité de réparer les lourds dommages causés par ses choix et son inaction.