Les cicatrices économiques et sociales du nord du N.-B.
J’ai eu l’honneur de siéger au conseil municipal de Bathurst pendant 21 ans, dont 12 ans en tant que maire. Durant cette période, j’ai appris à connaître de près de nombreuses industries qui ont contribué à notre économie, non seulement dans le nord du Nouveau-Brunswick, mais partout dans notre province. Ces industries ont fourni les revenus qui ont payé pour nos services publics.
Alors qu’on parle des défis financiers du Nouveau-Brunswick, il est important de rappeler que ceux-ci sont principalement dus au déclin de l’industrie partout dans notre province, en particulier dans le Nord.
Ces industries ont fait plus que rapporter des recettes aux gouvernements, elles ont contribué à la qualité de vie de nos collectivités, et ce, grâce à des emplois bien rémunérés.
En même temps, les changements climatiques sont un véritable défi pour la planète. Ici, au Nouveau-Brunswick, nous avons déjà atteint nos objectifs, mais cette réussite est directement liée à notre déclin économique.
En douze ans seulement, les émissions de gaz à effet de serre du Nouveau-Brunswick sont passées de 20,0 mégatonnes en 2005 à 14,3 mégatonnes en 2017.
Malheureusement, ce progrès environnemental impressionnant ne s’est pas fait sans inconvénient économique. Il est presque entièrement dû au déclin de l’économie industrielle du nord du Nouveau-Brunswick.
Depuis 2005, les principaux employeurs industriels suivants ont fermé leurs portes dans les comtés de Restigouche, de Gloucester et de Northumberland:
- L’usine Smurfit-Stone à Bathurst (2005);
- Le moulin Weyerhaeuser à Miramichi (2007);
- L’usine UPM-Kymmene à Miramichi (2007);
- Le moulin AbitibiBowater à Dalhousie (2008);
- L’usine chimique Olin à Dalhousie (2008);
- La centrale électrique d’Énergie NB à Dalhousie (2012);
- La mine Xstrata à Bathurst (2013);
- La fonderie Glencore à Belledune (2019).
La fermeture de ces installations représente une réduction de 2,5 mégatonnes sur les 5,7 mégatonnes de réduction du Nouveau-Brunswick au cours de cette période.
En outre, plus d’un quart des émissions de la province proviennent des transports. Comme la population du nord du Nouveau-Brunswick a considérablement diminué, en grande partie à cause des pertes d’emplois entraînées par la fermeture de ces installations, il y a moins de voitures sur les routes, ce qui réduit encore les émissions dans le Nord.
Plus de 43% de nos réductions proviennent d’une région qui ne représente que 20% de notre population.
Aujourd’hui, nos gouvernements fédéral et provincial envisagent de fermer la centrale d’Énergie NB à Belledune d’ici 2030. La fermeture de Belledune réduira nos émissions de 2,8 mégatonnes supplémentaires, mais entraînera également la perte de centaines d’emplois.
En effet, une grande partie des efforts visant à améliorer l’environnement s’est faite au détriment de l’économie du nord du Nouveau-Brunswick.
Maritime Iron propose une installation de pointe pour raffiner le minerai de fer du Québec et du Labrabor à Belledune. Cette installation permettrait de sauver les emplois à la centrale d’Énergie NB à Belledune et d’en créer des centaines d’autres.
En comptant les 2,8 mégatonnes actuellement émises par l’installation d’Énergie NB à Belledune, l’exploitation combinée émettrait 4,9 mégatonnes. Il s’agirait d’une augmentation nette de seulement 2,1 mégatonnes par rapport à la réduction de plus de 2,5 mégatonnes enregistrée ailleurs dans le nord du Nouveau-Brunswick au cours des 15 dernières années.
Il fut un temps où notre province aurait accueilli favorablement les avantages économiques et sociaux qu’un projet comme celui-ci procure et elle devrait le faire. Il est essentiel que nous trouvions un équilibre entre la nécessité d’une gestion environnementale saine et la nécessité de la survie économique. Nous devons continuer à le faire. Notre population et notre province ne sont pas si riches que nous puissions nous permettre de tourner le dos à des opportunités économiques majeures.
Le monde a besoin d’acier. L’acier ne peut être fabriqué sans raffiner le minerai de fer. Quelque part sur cette planète, ce raffinage va se produire. Il peut se produire ici, au Nouveau-Brunswick, où nous pouvons profiter des avantages économiques, ou il peut se produire ailleurs, ou d’autres profiteront des avantages économiques.
Dans les deux cas, l’impact environnemental sera le même, ailleurs il pourrait être pire. Bloquer ce projet n’aidera pas l’environnement. En fait, la réduction de la pollution causée par le transport du minerai du Québec et du Labrador à l’autre bout du monde fait du projet Maritime Iron la meilleure solution sur le plan mondial.
Il est temps que les trois niveaux de gouvernement travaillent ensemble pour faire de ce projet une réalité. C’est bon pour l’environnement sur le plan mondial, pour l’économie du nord du Nouveau-Brunswick et, franchement, de tout le Nouveau-Brunswick.
Même avec la modeste augmentation des émissions que ce projet entraînera, le nord du Nouveau-Brunswick aura enregistré d’importantes réductions nettes des émissions au cours des deux dernières décennies. Avec ou sans ce projet, le Nord contribue bien plus que sa part aux objectifs de réduction des émissions de la province.
Les politiciens municipaux de toute notre région soutiennent ce projet. Il est temps que nos représentants provinciaux et fédéraux se joignent à nous et se battent pour faire de ce projet une réalité.
La lutte contre les changements climatiques est importante et le nord du Nouveau-Brunswick y a contribué plus que sa part. Les cicatrices économiques et sociales de nos communautés en sont la preuve.
Si l’on considère ce que sera réellement ce projet, les centaines d’emplois créés par la nouvelle installation et les milliers d’emplois créés par les retombées économiques, il devient évident qu’il faut aller de l’avant. Nous devons tous travailler ensemble pour faire en sorte que tout ce qui peut être examiné le soit dans l’espoir de faire de ce projet une réalité.
Stephen Brunet
Ancien maire de Bathurst