Comme beaucoup d’entre vous, j’ai suivi d’un œil, parfois deux, la cérémonie du couronnement.

Étant consciente du rôle qu’a joué la couronne britannique en déportant les Acadiens, impossible de prêter fidélité et obéissance à cette monarchie anglaise qui a tenté d’anéantir le peuple acadien. Certains diront c’est de l’histoire ancienne, arrêtons de pleurer sur notre passé et passons à autre chose.

On peut être d’accord ou pas, mais le problème demeure très actuel. Charles III est devenu automatiquement le roi du Canada et nous sommes tenus de lui prêter un serment d’allégeance dans les fonctions publiques du Canada.

De plus, la gouverneure générale du Canada, représentante du roi, chef du Canada, préside à l’assermentation du premier ministre, des membres du cabinet et du juge en chef de l’État canadien, convoque le Parlement et accorde la sanction royale aux lois du Parlement.

Elle peut même nommer ou révoquer un premier ministre et dissoudre le Parlement, ce n’est pas rien.

Il y a l’homme et il y a la Couronne. L’homme, comme tout humain, a ses forces et ses faiblesses avec un lourd passé qu’il doit porter. Comme roi, il symbolise les valeurs de justice, d’équité, de vérité, de liberté, de fidélité et de loyauté au service du peuple et de Dieu.

En résumé, il doit être le modèle ultime, plus haut, plus grand que l’homme. La référence ultime après Dieu, comme l’a indiqué l’archevêque de Canterbury lors du couronnement.

On peut se demander si ses actions passées passent le test pour un modèle de roi ou comment nous, simples citoyens, non élus de Dieu, allons le suivre?

J’ai vraiment un dilemme de conscience. Bien que je ne puisse me rallier à la Couronne par suite du traitement qu’elle a fait subir au peuple acadien, je ne peux non plus comprendre comment, sur le plan des principes et de l’éthique, on peut s’y rallier.

J’imagine que les peuples autochtones et les peuples noirs qui ont subi les pires sévices ont le même dilemme.

La seule explication que je trouve, c’est que les gens ont besoin de croire en quelque chose de plus grand qu’eux. Quelque chose qui peut les faire rêver et que le prix à payer c’est de regarder de l’autre côté, ne pas vouloir trop penser, trop voir, trop savoir.

Plusieurs font du marchandage avec leurs valeurs profondes. Justifient, rationnalisent au profit de la stabilité, peut-être, car le changement demande trop d’efforts. L’inconnu est souvent inquiétant. On veut ou on a besoin de croire à quelque chose de plus beau, de plus grand que nous. Quelque chose qui nous élève, nous rassemble, nous donne espoir et donne un sens à notre vie individuelle et collective.

Tout a un prix même pour la monarchie. Le prix d’être le parangon de vertu et de justice que symbolise la couronne et qu’elle nous demande de reconnaître dans ce serment d’allégeance. Quelqu’un qu’on peut admirer et dont on prend modèle nous simple humain pour améliorer notre vie. Comment peut-on se rallier à cette monarchie?

On peut seulement espérer que Charles III livrera la marchandise tel que les excuses aux peuples autochtones, aux peuples noirs, que la couronne britannique, a réduit en esclavage et certainement à nous les Acadiens pour avoir seulement voulu vivre en paix à l’époque de la Déportation.

Peut-être qu’à ces prix-là, on pourra dire oui, la monarchie a sa place et remplit le mandat qu’elle symbolise et nous demande d’accomplir, puisque nous avons l’obligation de fidélité et d’obéissance au roi.

Lucie LeBouthillier
Bas-Caraquet, Caraquet

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