Le 24 avril, le ministre de l’Éducation et du Développement de la petite enfance, Bill Hogan, a dévoilé une nouvelle politique publique qui consiste à venir en aide aux écoles n’ayant pas de programme d’aide alimentaire en ignorant celles où des bénévoles se sont engagés.

Rappelons les faits: à l’origine se trouve le problème des enfants qui se présentent à l’école, le matin, sans déjeuner. Jusqu’en avril dernier, rien n’était fait du côté de l’État pour satisfaire ce besoin. Les enseignants se plaignaient des gargouillis dans le ventre des élèves affamés qui manifestaient des problèmes de comportement et de concentration nuisant à leur apprentissage.

L’État savait pourtant que la moitié des élèves ne déjeunaient pas à la maison avant de prendre la route pour l’école, mais il jouait la carte du retrait. Il aurait pu utiliser des fonds publics pour nourrir ces enfants, mais il a plutôt choisi de laisser les groupes de citoyens s’organiser pour faire des collectes de nourriture. Des groupes, comme la Fondation des petits déjeuners de la Péninsule acadienne, ont voulu remédier au manque d’engagement public. Ils ont tenté de nourrir les enfants à l’école en collectant des fonds et en organisant des activités de financement telles que des bingos et des tournois de golf.

Ils étaient de bonne foi et ils l’ont fait parce que l’État se désistait et qu’ils avaient à coeur de voir les enfants déjeuner avant d’entamer la journée scolaire. Ils ne pensaient jamais qu’un jour, le gouvernement changerait sa politique et assumerait cette charge, sinon, ils auraient attendu.

Et comme les citoyens ne sont pas tous capables de s’organiser, certains élèves étaient mieux servis que d’autres. Il devenait de plus en plus évident que l’État devait faire quelque chose pour que tous les enfants puissent manger pour étudier.

Voilà qu’en avril 2023, le gouvernement dit qu’il va intervenir, mais qu’il ne prêtera main-forte qu’à ceux qui n’ont rien fait, tandis que les autres devront continuer à recueillir des fonds, comme ils le faisaient.

Bien sûr, les entreprises, les fondations et les nombreux bénévoles qui s’étaient organisés pour offrir à leur compte des petits déjeuners à l’école se sont sentis floués. La déclaration du ministre les a frustrés, puisqu’ils s’étaient démenés pour se substituer à l’État et ils se voyaient alors laissés pour compte.

Cette politique comporte une injustice administrative, car elle récompense le désengagement. S’appuyant sur l’entraide et la générosité, elle permet certes de réduire la dépense publique, mais elle cause un accroc à l’équité sociale puisqu’elle conduit à des inégalités d’une région à l’autre.

Elle est aussi à deux poids: elle favorise ceux qui ne s’organisent pas en leur permettant de bénéficier de fonds publics, tout en encourageant ceux qui s’engagent bénévolement à continuer à le faire.

Elle est, en plus, une demi-mesure, car le problème de la faim persiste dans la moitié des écoles de la province: seulement 160 écoles sur 322 ont un programme d’aide alimentaire.

Une telle politique aurait dû faire l’objet d’un débat public qui aurait permis de l’étudier en profondeur avant son adoption. Les consultations auraient sans doute soulevé la question à savoir qui est responsable de la protection des citoyens, une question qui demeure, au fond, l’enjeu principal.

De toute évidence, cette politique ne passe pas le test de l’acceptabilité sociale. Une personne ordinaire aurait tendance à récompenser les efforts de ceux qui s’évertuent, au lieu d’accorder un avantage aux inactifs.

N’est-ce pas que la diligence envers ceux qui s’engagent devrait être plus estimée que la bonne grâce envers ceux qui ne font rien?

Claude Snow
Comité des 12

logo-an

private

Vous utilisez un navigateur configuré en mode privé ou en mode incognito.

Pour continuer à lire des articles dans ce mode, connectez-vous à votre compte Acadie Nouvelle.

Vous n’êtes pas membre de l’Acadie Nouvelle?
Devenez membre maintenant

Retour à la page d’accueil de l’Acadie Nouvelle